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À l'horizon | La jeunesse et les politiques culturelles : l’âge de la maturité

La jeunesse et les politiques culturelles : l’âge de la maturité

On dit souvent des jeunes qu’ils sont notre avenir. Mais ils sont aussi notre présent. Les 1.2 milliards de jeunes dans le monde – soit environ 16% de la population mondiale- forment la plus vaste génération de jeunes de l’histoire. Près de 90% d’entre eux se trouvent aujourd’hui dans des pays en développement, où ils constituent une part importante de la population. En Afrique, le continent le plus jeune au monde, , selon le PNUD. Les jeunes d’aujourd’hui sont confrontés à une situation sans précédent : ils sont non seulement trois fois plus susceptibles que les adultes d’être touchés par le chômage, mais ils doivent également faire face à des défis parmi les plus importants que l’humanité ait connu. Le changement climatique, la montée des inégalités, les conflits liés à la l’intelligence artificielle et les nouvelles technologies, les vulnérabilités liées aux clivages raciaux et culturels dans des sociétés de plus en plus fragmentées…Les jeunes d’aujourd’hui devront évoluer dans un paysage complexe et incertain. La pandémie a exacerbé cette situation en bouleversant la vie des jeunes du monde entier ; comme le montrent de , l’anxiété des jeunes face à l’avenir se traduit par un isolement accru, une marginalisation et, potentiellement, à l'extrémisme.

Les tendances mondiales indiquent que la culture offre des réponses multiples face à ces défis. Les jeunes sont les gardiens pour l’avenir de notre patrimoine riche et diversifié et le moteur d’idées nouvelles et de créativité. Malgré les disparités en matière d’éducation, aucune génération n’a été aussi alphabétisée et exposée à un volume aussi important et diversifié de connaissance, mais également aux fake news, notamment sur les défis auxquels l’humanité et la planète sont confrontées. Aujourd’hui, les jeunes montrent une conscience politique plus aigüe et une volonté accrue de contribuer à la vie culturelle et civique. Plus que jamais connectés les uns aux autres par le biais des technologies numériques, ils contribuent déjà à la résilience de leurs communautés en proposant des solutions innovantes, en accompagnant le progrès social et en inspirant le changement politique. Investir sur la jeunesse a un effet d’entrainement sur l’ensemble des sociétés. Tirer parti de l’énergie, de l’inspiration et du dynamisme des jeunes du monde entier est une voie essentielle pour construire un monde meilleur et œuvrer en faveur de l’ambitieux Programme du développement durable.

 

Priscilla Du Preez/Unsplash.com

 

L’UNESCO figurait parmi les premières agences des Nations Unies disposant d’un programme pour la jeunesse qui s’appuie sur le pouvoir de la culture, et l’appréciation de la diversité culturelle, pour construire la paix dans l’esprit des hommes et des femmes. En 1947 à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, l’Organisation a reconnu que la participation des jeunes à la reconstruction du patrimoine culturel en Europe était un moyen de panser les stigmates des conflits. La nécessité d’engager pleinement la jeunesse pour construire la paix et œuvrer au développement est aujourd’hui pleinement reconnue au sein du système des Nations Unies. En 2018, l’ONU a publié une stratégie pour la jeunesse afin d’amplifier son travail avec et pour les jeunes à travers ses trois piliers : développement durable, paix et sécurité, et droits de l’homme. Un envoyé spécial de l’ONU pour la jeunesse, Jayathma Wickramanayake, a été nommé depuis 2017. Alors que l’ONU définit la « jeunesse » comme les personnes âgées de 15 à 24 ans, l’UNESCO a reconnu que la jeunesse est une catégorie fluide, en constante évolution, qui varie selon les pays et les régions.

Le droit de la jeunesse à accéder, bénéficier et participer à la vie culturelle est inscrit dans le droit international, et constitue un élément essentiel de leur droits humains et culturels. La participation à la vie culturelle est nécessaire pour les jeunes afin d’acquérir une compréhension de leur propre culture et de celle des autres, permettant ainsi d’élargir leurs horizons, de renforcer leur capacité à résoudre les conflits de manière pacifique et de favoriser le respect de la diversité culturelle. L’action de l’UNESCO en matière de jeunesse – en tant qu’agence des Nations unies disposant d’un mandat sur la culture et l’éducation – est guidée par l’objectif de développement durable 4.7, qui invite tous les apprenants à acquérir une appréciation du rôle de la culture pour la paix et la non-violence, la citoyenneté mondiale, la diversité culturelle et de la contribution de la culture en faveur du développement durable.

En tant que l’un de ses groupes prioritaires, l’engagement de l’UNESCO auprès de la jeunesse est guidé par sa . La Stratégie encourage l’engagement auprès de la jeunesse dans l’action de l’UNESCO de l’intégration « en amont » des préoccupations des jeunes dans l’agenda politique aux initiatives locales menées par les jeunes dans leurs communautés. En travaillant aux côtés des jeunes leaders, des entrepreneurs et membres d’organisations de jeunes, des jeunes femmes, de la jeunesse marginalisée et des jeunes en situation de handicap, la stratégie suit trois axes : 1) la formulation et la révision des politiques avec la participation des jeunes ; 2) le développement des capacités pour la transition vers l’âge adulte ; 3) l’engagement civique, la participation démocratique et l’innovation sociale.

Amplifier la voix de la jeunesse à travers les programmes culturels de l’UNESCO

L’intégration des perspectives de la jeunesse au sein des Conventions et des programmes culturels de l’UNESCO s’est approfondie au fil du temps depuis les premiers camps de jeunes après la Seconde Guerre mondiale, devenant plus structurée et intégrée. Depuis 1995, l’UNESCO organise chaque année, conjointement avec le Comité du patrimoine mondial, un Forum des jeunes sur le patrimoine mondial, leur offrant la possibilité de s’informer et de réagir aux menaces qui pèsent sur le patrimoine mondial. Lors du premier sur le patrimoine mondial, qui a eu lieu à Bergen en Norvège, les jeunes ont appelé à intégrer l’éducation au patrimoine culturel et naturel dans les programmes scolaires afin de mieux comprendre les défis engendrés par la protection et la conservation du patrimoine culturel et naturel tels qu’ils sont inscrits dans les principes de la . Les participants ont également appelé à une meilleure représentation auprès des autorités locales et nationales à travers des comités consultatifs de jeunes. Depuis ce premier Forum des jeunes sur le patrimoine mondial, une quarantaine de forums de jeunes internationaux, régionaux et nationaux ont été organisés dans le monde entier.

Les Forums sont aux avant-postes des nouveaux défis que la jeunesse doit affronter, et intègrent leurs perspectives dans le développement des politiques culturelles. Par exemple, lors du Forum des jeunes professionnels de 2019, tenu à Bakou en Azerbaïdjan, les participants ont mis en avant la perspective de la jeunesse sur le thème « Patrimoine mondial : perspectives locales pour des enjeux mondiaux », faisant le lien entre le et avec le Programme de développement durable. Ce thème est particulièrement pertinent au regard du Rapport sur l’état des villes dans le monde qui estime que les jeunes et les enfants constituent environ 40% de la population mondiale, et que 60% des habitants des villes auront moins de 18 ans en 2030, créant ainsi une « explosion de la jeunesse urbaine » qui impose de reformuler le contrat social entre les jeunes et leurs sociétés.

 

Brian Lundquist/Unsplash.com

 

Un nouveau réseau de jeunes professionnels de la culture et du patrimoine a également émergé d’un projet de l’Union européenne et de l’UNESCO en 2019 : . Le « Forum européen des jeunes professionnels au patrimoine », tenu à Zada en Croatie, a été le premier Forum de ce type à évoquer à la fois les synergies et les défis liés au patrimoine matériel et immatériel dans le contexte Européen. Le projet a abouti à la création d'un nouveau réseau constitué de 28 jeunes professionnels du patrimoine qui peuvent agir comme des « messagers du patrimoine culturel » dans leurs propres pays et communautés et sensibiliser activement à l’importance de l’entretien et de la transmission de notre patrimoine commun.

Si la Convention du patrimoine mondial de 1972 de l’UNESCO a ouvert la voie en intégrant les perspectives et les actions des jeunes dans sa mise en œuvre, l’UNESCO a progressivement intégré les jeunes dans d’autres domaines de son action culturelle. Les jeunes constituent un groupe prioritaire pour le réseau des Villes créatives de l’UNESCO et ses 246 membres sont encouragés à s’engager auprès de la jeunesse. Plus tôt cette année, par exemple, la ville créative de la Gastronomie de l’UNESCO, Parme, a accueilli qui mettait l’accent sur la culture, l’environnement, la nourriture, l’éducation et la régénération urbaine. De plus, les jeunes restent un groupe prioritaire au regard du travail de l’UNESCO sur le patrimoine culturel immatériel pour transmettre les connaissances, savoirs et savoir-faire de génération en génération. Lors du Forum des jeunes de l’UNESCO en 2018, les jeunes ont été appelés à raconter l’histoire de leur patrimoine culturel vivant, notamment les tatoueurs samoans et les conteurs traditionnels guyanais.

Les musées jouent un rôle essentiel pour inciter les jeunes à s’impliquer et devenir des citoyens actifs, notamment en offrant des possibilités d’éducation non formelle incluant les jeunes marginalisés. Une publication de 2015 du Réseau des organisations européennes de musées (NEMO), par exemple, rassemble des bonnes pratiques pour travailler avec les jeunes et offre des conseils pour l’amélioration des programmes en faveur de la jeunesse. L’UNESCO accentue également son engagement auprès de la jeunesse sur le thème de la valeur des musées, avec l’organisation d’un premier évènement en mai 2021 qui a accueilli 300 jeunes en collaboration avec le Zeitz Museum of Contemporary Art Africa (Afrique du Sud), la Galerie nationale des Iles Caïmans (Iles Caimans), le Child Museum du Caire (Égypte) et le Victoria and Albert Museum Albert (Royaume-Uni).

 

Iakov Filimonov/Shutterstock.com

Culture et emploi : un tremplin vers l’âge adulte

Le chômage est l’un des défis majeurs pour la jeunesse. On estime qu’environ . À l’échelle mondiale, (nor in employment, education or training), ce qui signifie qu’ils n’ont ni emploi ni formation en cours ; Ils n’obtiennent ainsi aucune expérience sur le marché du travail, ne reçoivent pas de rémunération et n’améliorent pas leur niveau de formation et leurs compétences. . De plus, la dernière évaluation de l’Organisation mondiale du travail (OIT) indique .

Avant le début de la pandémie de COVID-19, les industries culturelles et créatives représentaient 30 millions d’emplois dans le monde et employaient plus de personnes âgées de 15 à 29 ans que tout autre secteur. De plus, , comme le souligne un récent rapport de la Banque mondiale : Orange Economy: Un moteur pour l'emploi des jeunes (Orange Economy: As a Driver of Jobs for Youth en anglais.) Au Pakistan, par exemple, près d’un tiers des personnes exerçant des professions créatives et culturelles ont moins de 24 ans. De même, au Ghana et en Ouganda, plus de 25 % des personnes travaillant dans l’économie créative sont des jeunes. Les industries culturelles et créatives peuvent également ouvrir des perspectives aux jeunes défavorisés, notamment les réfugiés ; Abdulrahman Naseb, étudiant syrien réfugié en Jordanie, s’y est ainsi grâce à une initiative de formation professionnelle. De façon générale, élargir l’accès aux industries culturelles et soutenir les jeunes artistes et entrepreneurs par le biais de subventions et de programmes de validation des acquis, devrait être une composante essentielle des stratégies de relance post-crise.

 

Les industries culturelles et créatives emploient plus de personnes entre 15 et 29 ans que tout autre secteur.

(Ernst & Young, 2015)

Los Muertos Crew/Pexels.com

 

L’UNESCO soutient les jeunes entrepreneurs culturels à travers le Fonds international pour la diversité culturelle – lié à la – et a accompagné 120 projets dans 60 pays en développement depuis 2010. Les jeunes représentent au moins la moitié des bénéficiaires des projets, de la formation des femmes et des jeunes créateurs au Honduras, et l’engagement de la jeunesse namibienne sur le marché mondial de la musique, à la mise en place d’un secteur audio-visuel pour une communauté défavorisée en Indonésie, ou encore au soutien à la musique Steel Pan à Sainte-Lucie. Plus récemment, l’initiative , soutenue par la philanthrope Sabrina Ho a stimulé les opportunités pour les jeunes femmes entrepreneures dans le secteur créatif, tandis qu’une lancée en 2020 en collaboration avec la réalisatrice Japonaise Naomi Kawase soutient 10 jeunes femmes africaines réalisatrices de films.

L’emploi dans le secteur créatif est particulièrement important dans les centres urbains et peut représenter jusqu’à 13% de l’emploi dans les villes principales du monde entier comme l’a souligné la récente publication de l’UNESCO et de la Banque mondiale intitulée « Villes, culture, créativité : tirer parti de la culture et de la créativité pour un développement urbain durable et une croissance inclusive ». De nombreuses villes parmi les 246 villes du s’appuient sur la créativité pour créer de l’emploi pour la jeunesse. Par exemple, Lviv (Ukraine), Ville créative de littérature de l’UNESCO , Shenzhen, Ville créative de design de l’UNESCO, a accueilli le Prix du design de Shenzhen pour les jeunes talents ( en anglais), tandis que Popayan (Colombie), Ville créative de gastronomie, a lancé une librairie digitale sur le patrimoine culturel traditionnel avec des sections destinées à encourager les jeunes créatifs dans les métiers de la restauration et de l’hôtellerie.

Le secteur du patrimoine culturel soutient également l’emploi des jeunes. Au Yémen, l’initiative de l’UNESCO et de l’UE « Rémunération contre travail » (« » en anglais) a déjà employé plus de 2350 jeunes au service de la restauration des villes du Patrimoine mondial et des centres historiques urbains, plus de 150 bâtiments historiques ayant ainsi été réhabilités. L’initiative a permis également de soutenir les artistes, les initiatives de la jeunesse et les campagnes de sensibilisation visant à stimuler les industries culturelles et créatives. Un dispositif similaire est mis en place dans le cadre de l’initiative phare de l’UNESCO , en Iraq, grâce à laquelle 1 500 jeunes – ainsi que des personnes déplacées à l’intérieur du pays et des rapatriés – ont accédé à des opportunités d’emploi à Mossoul et à Bassora. Ces projets dans la région arabe reflètent la reconnaissance accrue de la capacité du secteur culturel à offrir un gisement d’emplois pour la jeunesse, luttant ainsi contre l’extrémisme violent et l’exode massif des jeunes. De même, les jeunes insufflent des idées nouvelles pour la conservation du patrimoine, par exemple en utilisant l’imagerie 3D pour créer des répliques numériques de sites, comme le fait la start-up ICONEM avec laquelle l’UNESCO s’est associée.

Les pratiques et les compétences liées au patrimoine immatériel – dont la transmission intergénérationnelle est essentielle – peuvent également fournir des opportunités d’emploi pour la jeunesse. Par exemple, les écoles professionnelles en Turquie permettent d’obtenir un diplôme de deux ans dans l’art des carreaux traditionnels de faïence et de céramique faits à la main, appelés Cini, permettant ainsi aux jeunes d’acquérir les compétences, la créativité et la capacité de conception nécessaires pour accéder au marché du travail. Le ministère du Travail et des Ressources Humaines du Bhoutan a renforcé et élargi son réseau d’instituts d’art et d’artisanat traditionnel, en veillant à ce que les liens avec les monastères et les villages détenteurs du savoir-faire traditionnel soient maintenus. Le ministère de la culture et des sports de Grèce s’efforce également de fournir un enseignement et une formation technique et professionnelle (EFTP) dans le domaine de la construction navale vernaculaire. Si la formalisation de la formation des jeunes en matière de patrimoine culturel immatériel peut élargir leurs opportunités d’emploi, il est également important que ce patrimoine ne soit pas entièrement décontextualisé en dehors de la communauté.

 

Les jeunes aspirent à rétablir des liens avec leur patrimoine. Ils ne savent pas nécessairement comment le faire, et les écoles sont un espace utile dans cette perspective.

John De Coninck, Fondation interculturelle de l’Ouganda

L’Intégration de la culture – notamment le patrimoine vivant – au sein des programmes scolaires, peut également renforcer la pertinence de l’enseignement pour les apprenants et favoriser leur développement. Dans le cadre d’un projet UNESCO-UE sur le patrimoine, par exemple, dix expériences pilotes sont en cours pour tester les méthodes d’enseignement du patrimoine culturel immatériel dans la région européenne et un nouveau kit pédagogique a été produit pour les enseignants. Le projet complète ainsi les expériences documentées dans la publication de 2017 de l’UNESCO , qui illustre la façon dont les éléments inscrits sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel peuvent être intégrées à l’enseignement de nombreuses disciplines. L’art sur camion pakistanais (« Truck art » en anglais) offre un support d’apprentissage sur la composition de la peinture dans les cours de chimie , la musique traditionnelle Muong du Viet Nam permet de comprendre la source des sons, les jeux populaires Besh Tosh et Lank Uzbek ouvrent aux sciences physiques et de la santé tandis que la notion de respect au sein de la communauté est un levier de transmission de la sécurité routière à Palau.

Plus largement, les compétences acquises au travers de la culture et de la créativité deviennent de plus en plus importantes dans un monde du travail en mutation rapide. Le rapport Le futur de l’emploi (« » en anglais) publié en 2018 par le Forum économique mondial prévoit ainsi que la créativité, l’innovation et l’imagination seront des compétences clés pour le travail de demain, les tâches manuelles étant de plus en plus automatisées. L’UNESCO est actuellement engagée dans une importante réflexion mondiale – impliquant directement les jeunes – sur qui vise à repenser l’éducation dans un monde de plus en plus complexe, incertain et précaire. Les rapports d’étape indiquent déjà qu’il sera vital « d’ouvrir l’éducation à la promotion d’une diversité de cultures et d’épistémologies, et de faire bon usage de concepts tels que le soin, l’ubuntu [mot d’Afrique australe évoquant l’« humanité »], le teraanga [mot wolof signifiant « hospitalité »], le sumak kawsay [terme quechua signifiant « bonne vie »], l’ayni y minka [concepts quechuas liés au travail collectif] ».

 

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Culture et éducation : piliers d’une société meilleure

La culture et l’éducation sont des éléments essentiels pour la construction de sociétés plus fortes, résilientes et harmonieuses, à travers la transmission de valeurs d’inclusion, de respect et d’appréciation mutuelle de la diversité culturelle. Les sites du patrimoine mondial, par exemple, sont des dépositaires de connaissances, des laboratoires pour l’adaptation au changement climatique et des espaces privilégiés pour le dialogue interculturel. En reconnaissance de cette fonction importante, le incite les jeunes à participer à la conservation du patrimoine et à répondre aux menaces continues qui pèsent sur notre patrimoine mondial. Lancé en tant que projet spécial de l’UNESCO en 1994, il est le fruit d’une collaboration entre le Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO et le Réseau des écoles associées de l’UNESCO (réSEAU).

 

Le programme a développé plusieurs ressources à utiliser à l’intérieur et à l’extérieur des salles de cours. , élaboré en 1998, vise à sensibiliser les jeunes à l’importance de préserver leur patrimoine local, national et mondial. Disponible en 40 langues, il couvre des thèmes importants tels que l’identité, le tourisme, l’environnement et la culture de la paix. Une série de courts métrages intitulée « Patrimonito » a été développée dès 1994 par un groupe d’étudiants hispanophones. En outre, un manuel sur le patrimoine subaquatique a été produit en 2015 à l’attention des enseignants ; Intitulé , il entend non seulement souligner le rôle de la , mais aussi offrir un moyen concret d’introduire les principes de dialogue, de paix et de réconciliation.

, lancée en 2008, permet d’acquérir une expérience plus concrète de la préservation du patrimoine mondial. Depuis le premier projet qui s’est déroulé à Mosi-oa Tunya/chutes Victoria (Zambie et Zimbabwe) en 2009, 5000 volontaires ont participé à plus de 350 camps de jeunes sur 138 sites du patrimoine mondial. Ces expériences ont été rassemblées dans une publication récente célébrant les dix premières années de l’initiative intitulée Engager les jeunes en faveur du patrimoine (disponible en anglais sous le titre ). Répartis dans 60 pays, les sites bénéficiaires du projet comprennent des sites en danger et des sites figurant sur la liste indicative du patrimoine mondial, les jeunes ayant ainsi un réel intérêt à assurer l’avenir de ces sites, parmi lesquels les forêts tropicales de l’Atsinanana à Madagascar, le fort de Lalbagh au Bangladesh et le site inca d’Incallajta en Bolivie. Les pays prennent également des initiatives pour sauvegarder leur patrimoine culturel immatériel en le transmettant aux jeunes. Par exemple, la province du Fujian, dans le sud-est de la Chine, a visant à garantir la transmission de l’art des marionnettes aux générations futures, tandis que des jeunes Nàhuat du Salvador ont participé à un inventaire pour sauvegarder leurs traditions orales.

Les jeunes sont également des acteurs clés dans les efforts mondiaux de prévention de l’extrémisme violent, l’UNESCO étant chargée de coordonner les approches éducatives et culturelles dans ce domaine prioritaire pour les Nations Unies. À l’heure où le patrimoine culturel est de plus en plus dans la ligne de mire des conflits, comme le reconnaissent plusieurs Résolutions des Nations Unies (), l’UNESCO a lancé la campagne #Unite4Heritage en 2015. Cette campagne associait les médias sociaux et traditionnels, ainsi que des événements, pour construire un récit culturel alternatif à l’attention des jeunes vulnérables, afin de renforcer leur résilience dans la lutte contre l’extrémisme.

Dans la région arabe en particulier, l’UNESCO a soutenu les jeunes acteurs sociaux dans la prévention de l’extrémisme violent par la culture, en tirant parti des technologies numériques. En 2018, le projet de , a été lancé en collaboration avec le Bureau de lutte contre le terrorisme des Nations Unies pour soutenir l’engagement civique des jeunes et les doter de connaissances, d’outils et de compétences pour participer à la consolidation de la paix. Le projet “MediWander”, par exemple, vise à impliquer les collégiens et les lycéens à travers un jeu numérique qui adopte une approche créative afin de promouvoir le patrimoine matériel et immatériel de la Medina de Sousse, un site du patrimoine mondial de l’UNESCO.

Motiver les jeunes à s’intéresser davantage au patrimoine et leur faire découvrir l’histoire fascinante de leur médina est un défi. Notre jeu est conçu pour faire du patrimoine un sujet attrayant et adapté aux jeunes. En fin de compte, l’objectif est d’acquérir des connaissances et des compétences pour s’engager dans les efforts de consolidation de la paix par la solidarité et le respect de la diversité, l’éducation, la pensée critique, le dialogue, l’engagement et l’action.

Yoldez, jeune architecte tunisien, concepteur de MediWander

Le dialogue interculturel est un enjeu de plus en plus important dans les sociétés du monde entier, ainsi que dans des espaces en ligne de plus en plus interconnectés, en particulier pour les jeunes. Les minorités ethniques, linguistiques et culturelles sont plus susceptibles de faire partie des sous une forme ou une autre. L’éducation à la citoyenneté mondiale est une réponse à cette intolérance et le programme de l’UNESCO qui lui est dédié a exploré les pratiques culturelles du monde entier pour inculquer le respect de la diversité, dans sa publication . L’éducation aux médias et à l’information (EMI) joue également un rôle important dans la transmission des valeurs de respect de la diversité culturelle grâce aux efforts visant à renforcer l’alphabétisation culturelle. L’UNESCO - avec l’Alliance des civilisations des Nations Unies - a lancé le premier (University Network on Media and Information Literacy and Intercultural Dialogue - UNESCO/UNAOC-MILID), afin de faire converger les recherches récentes, de partager le matériel éducatif et de promouvoir les initiatives des jeunes dans le domaine des médias.

« Rien à propos de nous, sans nous »

Les jeunes ne sont pas des bénéficiaires passifs mais des partenaires et acteurs à part entière du développement durable et de la paix. Ils s’expriment de plus en plus et rejettent ce qu’ils considèrent comme du « tokénisme ». La culture et l’éducation figurent en bonne place parmi les priorités des jeunes et ceux-ci font de plus en plus part de leurs préoccupations dans les grands forums de débat politique. Par exemple, le groupe des jeunes du G20 des pays industrialisés (connu sous le nom de « Y20 ») a récemment mené une enquête sur les principales « préoccupations pour l’avenir » des jeunes, qui a mis en évidence que l’éducation et la culture sont les deuxième et troisièmes priorités les plus importantes, après le changement climatique. Dans le cadre du Sommet du G20 sous la présidence de l’Italie, les Y20 présenteront leurs recommandations, qui incluent le renforcement des synergies entre la culture et l’éducation, ainsi que l’amélioration de l’accès aux technologies numériques.

La pandémie a particulièrement mis en évidence le potentiel du secteur culturel à répondre aux besoins des jeunes en situation de précarité. Le secteur offre un gisement important d’emploi – un atout mis en lumière à l’occasion de l’Année internationale de l’économie créative au service du développement durable – contribuant ainsi à lutter contre la « fuite des cerveaux » qui voit de nombreux jeunes talents quitter leur pays d’origine pour rechercher de meilleures opportunités à l’étranger. Donner aux jeunes les moyens de participer activement à l’élaboration des politiques est ainsi un levier essentiel pour construire la confiance des jeunes professionnels et susciter leur engagement à investir dans leur société.

La culture peut également faciliter l’apprentissage et être un moyen pour les jeunes d’interagir socialement, comme l’a démontré la récente campagne de l’UNESCO sur les médias sociaux #YouthOfUNESCO , qui a mis en relation des jeunes du monde entier grâce à l’art du récit. La pandémie a mis en évidence l’importance des programmes d’échanges interculturels pour les jeunes – comme le programme ERASMUS de l’Union européenne qui a été interrompu pendant la crise sanitaire – pour ouvrir leur esprit à d’autres visions du monde. En outre, la culture peut être un moyen d’impliquer les jeunes dans le discours public et la vie civique, comme le démontrent les examens nationaux volontaires de plusieurs pays (voir la section Programme 2030).

 

Osman Yunus Bekcan/Unsplash.com

 

Réciproquement, les jeunes ont la capacité de revitaliser le secteur culturel lui-même, de par leur rôle de futurs gardiens du patrimoine de l’humanité et leur dynamisme qui nourrit la créativité. Mobiliser l’énergie et les idées des jeunes contribuera également à renforcer le rôle de la culture pour le développement durable dans tous les domaines des politiques publiques, de la santé à la protection de l’environnement, en passant par la sécurité alimentaire ou les villes durables. Dans un monde de plus en plus interconnecté – et face à des inégalités croissantes – exposer les jeunes à une plus grande diversité culturelle est l’un des leviers les plus sûrs pour former des citoyens du monde respectueux de la diversité culturelle, nourrir leur esprit critique, leur ouverture à la diversité et leur adaptabilité, et construire des sociétés plus pacifiques. Donner aux jeunes un rôle central dans les politiques culturelles constitue ainsi une force de transformation sociale.

Les gouvernements ont fait des avancées en matière d’intégration des jeunes dans l’élaboration des politiques dans le secteur culturel. Par exemple, les jeunes ont récemment participé activement à la pour la stratégie et le plan d’action culturels nationaux de la Somalie, ainsi qu’à la nouvelle politique culturelle de la Jamaïque en 2016 (élaborée avec le soutien du FIDC - Fonds international pour la diversité culturelle de l’UNESCO). Pourtant, des progrès supplémentaires pourraient être réalisés pour faciliter les initiatives des jeunes. Promouvoir des programmes d’échange entre pairs pour soutenir le partage des connaissances, fournir des subventions pour la création de jeunes entreprises et favoriser l’engagement actif des jeunes aux niveaux national et local, sont des leviers susceptibles de renforcer les politiques culturelles. L’UNESCO encourage les pays à renforcer la participation des jeunes en tant que partie prenante des processus de révision des politiques culturelles nationales.

Investir dans la jeunesse exerce un effet d’entrainement qui bénéficie à l’ensemble des communautés et contribue à la transformation sociale. Offrir aux jeunes des programmes de financement et de formation pour garantir leur participation à la transmission et à la sauvegarde du patrimoine vivant, à la conservation du patrimoine matériel ou encore à la vitalité des industries culturelles et créatives, constitue ainsi un investissement crucial des politiques publiques pour l’avenir. Les compétences numériques et l’éducation aux médias sont tout aussi importantes pour évoluer dans le monde contemporain ; si certains jeunes sont familiers avec les environnements numériques, d’autres ont besoin d’opportunités pour développer leurs compétences. De façon générale, renforcer la collecte de données liées à l’âge permettrait de mieux cerner l’état de la participation des jeunes dans les différentes formes de la vie culturelle, y compris en matière d’emploi culturel et d’éducation culturelle non-formelle.

Les voies par lesquelles les pays répondent aux mutations démographiques dans le monde, et celles qu’empruntent les jeunes dans leur transition vers l’âge adulte, sont essentielles pour le progrès de l’humanité et la santé de la planète. Comme le dit Kailash Satyarthi, lauréat du prix Nobel de la paix et défenseur de l’abolition de l’esclavage des enfants : « Le pouvoir de la jeunesse est la richesse commune du monde entier. Les visages des jeunes sont les visages de notre passé, de notre présent et de notre avenir. Aucun segment de la société ne peut rivaliser avec la puissance, l’idéalisme, l’enthousiasme et le courage des jeunes. »

 

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