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Avenir de la mémoire collective : préserver le passé à l’ère du numérique

À une époque où l’information est abondante, mais où son accès reste inégal, les plateformes numériques offrent des possibilités sans précédent de préserver et de démocratiser notre mémoire collective.
Drawings and writings of children during wartime in Europe

L’UNESCO adopte cette vision et reconnaît, par l’intermédiaire de son Programme Mémoire du monde, que le patrimoine numérique ne consiste pas simplement à numériser des documents, mais aussi à donner aux communautés, en particulier à celles historiquement marginalisées, les moyens de participer à l’élaboration et au partage de leur patrimoine en ligne.

Conformément à cet engagement, le Programme Mémoire du monde collabore avec la Fondation Khalili pour améliorer l’accès numérique au patrimoine documentaire en créant une riche base de métadonnées, d’informations contextuelles et de contenu narratif pour le Registre international Mémoire du monde sur les plateformes Wikimédia.

Ces plateformes sont plus que des archives de données ; il s’agit d’outils de dialogue interculturel. Elles permettent aux communautés de raconter leur propre histoire, de leur propre voix, selon leurs propres termes, tout en s’intéressant aux récits des autres.

Ce principe prend vie sur Wikipédia, que Liam Wyatt, Responsable des partenariats techniques à la Fondation Wikimédia, décrit comme allant au-delà de l’exactitude des faits. Son modèle de collaboration, explique-t-il, favorise le dialogue interculturel comme aucune publication à auteur unique ou descendante ne peut le faire.

« Nous estimons, en tant que communauté, qu’il s’agit d’une Å“uvre conçue par la communauté. Il s’agit d’un corpus de connaissances qui est écrit collectivement, ce qui est très différent de l’idée d’un simple partage de point de vue des individus Â», a déclaré M. Wyatt lors de la ³¦´Ç²Ô´Úé°ù±ð²Ô³¦±ð internationale organisée par le Programme Mémoire du monde en octobre 2024.

Ce processus est multilingue dès sa conception. En effet, Wikimédia prend en charge plus de 350 langues et leurs scripts associés, ce qui permet à diverses communautés de partager leur savoir de manière authentique. M. Wyatt a cité deux exemples récents : les wikimédiens balinais en Indonésie qui utilisent la reconnaissance optique de caractères pour numériser d’anciens manuscrits sur feuilles de palmier, et les contributeurs ukrainiens qui préservent des moments culturels perdus à cause de la guerre grâce à des concours de photographie.

Pour Wikimédia, ces efforts ne visent pas seulement à préserver le passé, mais aussi à récupérer le pouvoir narratif. « Il s’agit d’une décolonisation épistémologique Â», a déclaré la fondation. « Cela permet aux gens de trouver les références sur leur société écrites dans leur société et de les partager avec le monde, plutôt que de voir le monde leur parler de leur société en retour. Â»

Waqas Ahmed, Directeur exécutif de la Fondation Khalili, s’est fait l’écho de ce thème de la réappropriation de la participation grâce à la technologie. L’organisation de M. Ahmed a fait de l’échange culturel sa mission, en utilisant la collaboration comme outil pour dépasser les frontières et les plateformes.

« Il n’est pas nécessaire de contribuer exclusivement par des moyens financiers pour être un philanthrope culturel Â», a-t-il déclaré. « Il peut s’agir d’une photo, d’un scan, d’une collection personnelle, partagée pour le bien public. Â»

M. Ahmed a détaillé les partenariats avec des plateformes telles que Google Arts & Culture et Wikimédia afin de numériser et de diffuser les collections de la Fondation Khalili, l’une des plus importantes collections d’art islamique et asiatique au monde.

« La culture occidentale est largement représentée, tandis que les cultures non occidentales sont largement sous-représentées Â», a-t-il fait remarquer. « La bonne nouvelle, c’est que les plateformes le reconnaissent et travaillent avec nous pour y remédier. Â»

Selon M. Ahmed, la solution réside dans une approche multipartite, réunissant non seulement les grandes institutions, mais aussi les groupes communautaires, les chercheurs indépendants et les acteurs de la société civile. « Nous travaillons avec des musées nationaux, certes, mais aussi avec des bibliothèques communautaires, des archives et des groupes locaux. De cette manière, le récit devient un échange à double sens. Â»

Mais la durabilité reste un défi majeur. « De nombreuses institutions sont encore réticentes à l’idée d’adopter le libre accès Â», a déclaré M. Ahmed. « Les inquiétudes sont réelles : perte de contrôle, utilisation abusive. Et dans de nombreuses régions du monde, il y a tout simplement un manque de ressources ou d’infrastructures numériques. Â»

Pour surmonter cette difficulté, il faut non seulement de nouvelles technologies, mais aussi un changement de culture institutionnelle et l’instauration d’un climat de confiance entre les partenaires mondiaux.

« Il s’agit de s’assurer qu’il n’y a pas qu’une seule partie qui en bénéficie. Il s’agit d’un échange mutuel. Â»

M. Wyatt et M. Ahmed s’accordent à dire que les éléments visuels et expérientiels des plateformes numériques, tels que la réalité virtuelle ou le design interactif, sont essentiels pour attirer un public plus vaste. Mais au-delà de la technologie elle-même, ce qu’ils défendent tous deux est une valeur plus profonde : permettre aux gens de raconter leurs propres histoires, dans leur propre langue.

Comme l’a résumé M. Wyatt : « La meilleure forme de préservation est la distribution. L’accès libre, les formats libres, la participation libre, c’est ce qui maintient le savoir en vie. Â»

The Future of Collective Memory
Archives Astrid Lindgren, inscrites au Registre international Mémoire du monde en 2005.
The Future of Collective Memory
Documents relatifs aux voyages de l’empereur D. Pedro II au Brésil et à l’étranger, inscrits au Registre international Mémoire du monde en 2013.

À propos du Programme Mémoire du monde

Le Programme Mémoire du monde a été créé en 1992 pour sauvegarder le patrimoine documentaire pour les générations actuelles et futures. S’appuyant sur la Recommandation de l’UNESCO de 2015 concernant la préservation et l’accessibilité du patrimoine documentaire, y compris le patrimoine numérique, le Programme facilite la préservation et l’accessibilité de ces documents essentiels, tout en sensibilisant le public à leur valeur. Ses outils numériques innovants améliorent un peu plus l’accessibilité, en donnant vie à l’histoire de manière attrayante et pertinente.