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Le CERN et l’UNESCO : 60 ans de science pour la paix

Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, suite à un conflit qui réduisit la recherche fondamentale européenne en cendres, 12 pays européens décidèrent d’ouvrir une voie commune et d’établir l’un des principaux centres de recherche dans le domaine de la physique des particules : le CERN. La première organisation scientifique internationale d’Europe fut ambitieuse dès le premier jour, pionnière dans sa recherche des fondements de l’univers et dans sa volonté de construire la paix par la coopération scientifique internationale. La célébration des 60 ans du CERN a fourni l’occasion de revenir sur les avancées révolutionnaires de l’organisation au Siège de l’UNESCO, point de départ de l’aventure.
Le CERN a repoussé les frontières de la technologie en cherchant à approfondir nos connaissances de l’Univers. Le World Wide Web y a été imaginé pour permettre à un nombre croissant de scientifique de partager l’information, alors que ses Etats membres devenaient plus nombreux, passant de 12 à 21, et que les partenariats se multipliaient pour inclure des institutions du monde entier. Il fut placé dans le domaine public en 1993, dans le respect de l’un des principes fondateurs de l’organisation : partager les résultats le plus largement possible. De même, la Grille a été développée au CERN afin de regrouper la puissance de calcul d’ordinateurs du monde entier pour traiter les gigantesques quantités de données recueillies par les expériences du Grand collisionneur de hadrons (LHC). Les nouvelles techniques de détection électroniques conçus au CERN ont transformé l’imagerie médicale et amélioré les diagnostiques.
© 2007 CERN, for the benefit of the CMS Collaboration. Installation du plus grand détecteur de trace au silicium au sein de l'expérience CMS.
Le CERN a changé notre monde avant même d’identifier le Boson de Higgs en 2012. « La science s’épanouit par le dialogue, par le biais d’interaction entre les peuples et les cultures », dit la Directrice générale de l’UNESCO, Irina Bokova, en accueillant en compagnie du Directeur général du CERN, Rolf Heuer, les ministres les Affaires étrangères, les membres de la communauté scientifique et les représentants des Etats membres de l’UNESCO, du CERN, de l’Agence spatiale européenne (ESA et de l’Observatoire européen Austral (ESO) participant à la cérémonie. « La coopération scientifique – et donc la diplomatie scientifique – se trouvent au cœur de notre projet de construire un monde plus juste et équitable. »
« Il me semble » continua-t-elle, « que le CERN incarne l’approche « une planète »dont nous avons besoin afin de faire face aux défis mondiaux aujourd’hui – regarder au-delà des frontières, et des solutions par pays. L’UNESCO et le CERN appliquent cette vision sur le terrain, en soutenant l’éducation aux sciences, les librairies numériques, en portant une attention particulière aux femmes. Le CERN est bien plus qu’un centre de recherche de niveau international, c’est un lieu où nous tissons ensemble, fil à fil, le tissu de la solidarité morale et intellectuelle de l’humanité. »
« La philosophie d’ouverture et de transparence du CERN est exprimée dans sa convention » souligna Rolf Heuer, Directeur général du CERN. « Les engagements du CERN, tel qu’il y est écrit, de s’attacher à la recherche purement fondamentale et de rendre tous ses travaux publics ont contribué à la renommée du laboratoire. Ce sont ces engagements qui ont permis d’assurer une collaboration pacifique entre chercheurs de tous les pays. » Cette collaboration s’est maintenue pendant la Guerre froide, pendant laquelle les scientifiques du CERN travaillèrent avec leurs confrères soviétiques et américains. Aujourd’hui, la communauté du CERN comprend 6 000 ingénieurs et scientifiques venant de plus de 100 pays à travers le monde.
© UNESCO/P. Chiang-Joo. Rolf Heuer, Directeur général du CERN, prend la parole lors de la cérémonie du 60e anniversaire du CERN, au Siège de l'UNESCO, Paris, France.
Le CERN est devenu un modèle pour collaboration scientifique mondiale, ouvrant la voie à d’autres institutions qui, chacune dans leur domaine, combinent l’excellence et la diplomatie scientifiques. Dix and après la naissance du CERN, le Centre international Abdus Salam de physique théorique (ICTP) voyait le jour à Trieste, en Italie, sous l’égide de l’UNESCO.
Il vise à faire progresser les compétences scientifiques en mathématiques et physique dans les pays en développement et a déjà travaillé avec 188 pays. La dernière organisation en date à suivre le modèle du CERN est le Centre international de rayonnement synchrotron pour les sciences expérimentales et appliquées au Moyen-Orient (SESAME), un laboratoire intergouvernemental en construction en Jordanie qui se développe sous l’égide de l’UNESCO. Il vise à favoriser l’excellence scientifique et technique dans le Moyen-Orient et les pays proches tout en construisant des ponts scientifiques et culturels entre sociétés, contribuant ainsi à la culture de la paix par la coopération scientifique. Des scientifiques israéliens et palestiniens collaborent déjà au sein de la communauté de SESAME, prouvant ainsi que la science peut être une langue commune.
Cette idée – construire la paix par la science – était le fil rouge de la celebration et le sujet de la table ronde réunissant notamment Alexei Grinbaum, chercheur et philosophe au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives ; Fernando Quevedo, Directeur de l’ICTP ; Zehra Sayers, co-président de Comité consultatif scientifique de SESAME et Jan Van Den Biesen, vice-président des programmes de R&D pour Philips Recherche.
La cérémonie fit également un hommage émouvant à François de Rose, l’un des pères fondateurs du CERN, dont l’engagement envers les idéaux qui donnèrent naissance au CERN ne faibli jamais. Il fit une dernière visite au CERN en 2013, lors de la confirmation de la découverte du Boson de Higgs, avant de s’éteindre cette année.
Le CERN et l’UNESCO entretiennent des liens étroits depuis 60 ans, relations qui ont permis de développer des projets de coopération dans l’éducation, principalement. Actuellement, les deux organisations poursuivent notamment des projets de coopération pour la mise en place de bibliothèques numériques en Afrique et la formation d’enseignants en science dans les pays en développement.
Plus d'information :
- (en anglais)
- Combler la fracture numérique (octobre2012, , )
Planète science, volume 10, no. 4 - (2011)