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Le programme « Capitale mondiale du livre » de l'UNESCO est relancé sous la forme d'un réseau

Le 12 avril à Tbilissi, en Géorgie, vers la fin de l'année où cette ville a été désignée Capitale mondiale du livre (CML), des représentants de 19 des 22 Capitales mondiales du livre se sont réunis pour examiner des propositions visant à relancer le programme sous forme de réseau. Les États membres de l'UNESCO et les villes Capitales mondiales du livre ont avancé l'idée d'un réseau officiel ; une réunion préliminaire s’est tenue à Sharjah en 2021 pour marquer le vingtième anniversaire du programme.
Book Capital

Par James Tennant

Suite aux discussions qui ont eu lieu à Sharjah, un projet de rapport a été élaboré pour traiter les questions antérieures et définir une stratégie pour les années à venir. À Tbilissi, les représentants des villes de la CML, ainsi que ceux du comité consultatif du programme, comprenant l'UNESCO, le Forum international des auteurs, la Fédération internationale des associations de bibliothécaires et des Institutions et de l'Association internationale des éditeurs, ont partagé leurs projets, qui s'appuient sur la longue expérience du groupe. D’après Ian Denison, coordinateur de la CML à l'UNESCO, le rapport « présente une vision pour notre nouveau réseau qui, dans sa logique fondamentale et son éthique fondatrice, repose sur une idée de continuité, celle d’un pont du passé vers une arène dans laquelle la Capitale mondiale du livre... peut se remodeler avec succès Â».

La réunion inaugurale du réseau des Capitales Mondiales du livre (CML) a été ouverte par Andria Basilaia, maire adjoint de Tbilissi, et Pere Vicens, représentant de Madrid qui, lors de sa désignation en 2001, est devenue la toute première Capitale mondiale du livre. Avant les débats sur la portée du programme et ses perspectives, les délégués ont eu l’opportunité d’écouter Vicens, le fondateur de la Capitale mondiale du livre. Ce dernier a pu décrire comment le programme a été conçu, les aspirations initiales ainsi que les défis relevés. Des félicitations et remerciements ont été adressés à Ninia Matcharashvili, qui a dirigé le programme de plus de cinquante projets à Tbilissi au cours de l'année écoulée, une gageure, compte tenu des innombrables difficultés liées à la pandémie de Covid-19.

Les activités des Capitales mondiales du livre se sont généralement déroulées au cours de l'année - à partir du 23 avril (Journée mondiale du livre et du droit d'auteur) - où elles ont porté le titre. Les nouvelles lignes directrices du réseau engageront les villes à collaborer d'une année à l'autre, à la fois individuellement et collectivement. Grâce à une procédure de candidature détaillée, les futurs CML s'engagent désormais à organiser une réunion annuelle du RCML. Parmi les nouveautés dans la structure de gouvernance, un président de réseau sera nommé chaque année pour coordonner les activités du groupe et veiller à ce que le contact soit maintenu avec les anciennes villes et partenaires. Un site web central mettra en évidence les meilleures pratiques et études de cas. Les procédures de candidature sont en cours de mise à jour. Une plus grande transparence est demandée pour le processus de désignation et les cadres de suivi et rapports. Le réseau s'efforcera d'offrir un mentorat aux villes candidates et de fournir un retour d'information aux candidats non retenus. La mise en place d’un système de financement plus solide pour le réseau et ses activités connexes est en cours.

Le programme CML, qui se réunissait pour la première fois en tant que réseau, a discuté de ce qui l'a distingué et de la meilleure façon de tirer parti des programmes connexes plus récents de l'UNESCO, tels que le réseau des villes créatives (RVCU) et le réseau mondial des villes apprenantes (GNLC). Les futures villes du RCML s'engageront à travailler en faveur de l'Agenda 2030, ainsi qu'à approuver la Recommandation de 1980 relative à la condition de l'artiste et la Convention de 2005 pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles qui en découlent. Le lancement d'un prix annuel de la Capitale mondiale du livre est envisagé pour récompenser les personnes ou les organisations ayant apporté une contribution remarquable favorisant la lecture et l'alphabétisation. Une charte et une déclaration de mission ont été adoptées, incluant de nouveaux domaines d'intérêt tels que la diversité linguistique et la traduction littéraire. 

Convaincu que les livres et la lecture sont les pierres angulaires de sociétés plus inclusives, apaisées et durables, l'engagement actuel du programme CML en faveur de l'alphabétisation, de l'apprentissage tout au long de la vie, des droits d'auteur et de la liberté d'expression est renforcé par sa relance en tant que réseau actif. Le groupe affirme qu'en tant qu'agence des Nations Unies ayant un mandat spécifique pour promouvoir « la libre circulation des idées par le mot et l'image Â», l'UNESCO - par l'intermédiaire du RCML - devrait continuer à défendre l'expression libre, indépendante et pluraliste dans la presse écrite, la radio et la télévision, ainsi qu'en ligne. Le réseau soutient que la liberté de publication, le droit à l'alphabétisation et aux livres sont - selon les termes de l'Acte constitutif de l'UNESCO - des « droits de l'homme et des libertés fondamentales Â» inaliénables.

Parmi le groupe se trouvaient des représentants des deux prochaines villes Capitales mondiales du livre : Guadalajara, Mexique (2022) et Accra, Ghana (2023). Guadalajara a travaillé étroitement avec Tbilissi, notamment dans le cadre d'une résidence d'écrivains dans laquelle les romanciers mexicain Juan Pablo Villalobos ont pu séjourner en Géorgie, alors que l'auteur local Archil Kikodze s'apprêtait à se rendre à Guadalajara. L'écrivain Martín Solares, qui dirigera le programme d'événements de Guadalajara, a expliqué que le thème général de leur année, sur fond de violence locale, sera « comment les livres contribuent à la paix Â». Des centaines d'événements seront organisés dans tout l'État de Jalisco, notamment une série de conférences avec des écrivains de renom tels que Bernardo Atxaga, Sofi Oksanen, Alberto Manguel, Salman Rushdie, Laura Esquivel et Antonio Ortuño. Des ateliers sur la traduction, le reportage et la bande dessinée seront organisés. Rodrigo Medina, du conseil municipal de Guadalajara, estime que le nouveau réseau des villes Capitales du livre mondial représente « une occasion unique non seulement pour les villes Capitales d’apprendre les unes des autres, mais aussi une occasion de présenter au monde entier les réalisations du programme Â».

La délégation ghanéenne à Tbilissi était dirigée par l'honorable Elizabeth Naa Kwatsoe Tawiah Sackey, maire d'Accra, qui est la première femme à occuper ce poste. Sa collègue Ernesticia Lartey Asuinura - directrice exécutive du Conseil ghanéen de développement du livre, qui dirigera le programme CML d'Accra en 2023 - a salué l'engagement du réseau à garantir que les villes restent actives au-delà de leur année de désignation. Elle a expliqué que leurs plans mettent l'accent sur le renforcement des capacités et le développement professionnel des éditeurs du pays, des programmes durables qui porteront leurs fruits bien au-delà de 2023. Le Ghana compte environ 80 dialectes et langues, mais l'édition est limitée à moins de 15 d'entre eux. Elle a salué l'adhésion du réseau à la diversité linguistique ; le fait qu'Accra soit désignée comme capitale mondiale du livre a déjà accéléré les plans pour la création d'un Fonds de développement du livre afin de soutenir l'édition dans les langues locales. De plus, comme l'a souligné Lartey Asuinura: « la narration, le folklore ghanéen, fait partie intégrante de notre culture, mais c'est aussi quelque chose qui se perd à l'ère numérique ; nous étions heureux de voir dans le rapport l'intention de refléter diverses traditions orales, au-delà du livre imprimé traditionnel Â».