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À l'horizon | Culture et É»å³Ü³¦²¹³Ù¾±´Ç²Ô: un investissement stratégique pour un développement durable inclusif et durable
La pandémie de COVID-19 a été dévastatrice pour les secteurs de l’éducation et de la culture dans le monde entier. Les mesures de confinement ont lourdement affecté l’accès à la culture et les moyens de subsistance des professionnels de la culture, appelant les politiques publiques à encourager la diversité culturelle et à renforcer les mécanismes destinés à améliorer les conditions sociales et économiques. Les fermetures d'établissements d'éducation formelle et informelle ont écarté des millions de personnes des écoles et de la formation, tout en entrainant des pertes significatives en matière d’apprentissage, d’emploi et de bien-être. La relance ne repose pas uniquement sur la régénération de ces deux secteurs pris indépendamment, mais aussi sur des politiques publiques robustes et intégrées qui renforcent les synergies entre culture et éducation, et contribuent pleinement au respect des droits humains.
À travers le monde, si l’apport de la culture au secteur de l’éducation connaît une reconnaissance croissante, ce lien doit cependant être revisité afin de mieux s’adapter aux opportunités et aux défis de notre siècle. Alors que des données substantielles sont disponibles sur l’éducation, il existe un déficit de recherches et de chiffres qui démontrent les manières dont la culture est intégrée dans le champ de l’éducation. Cette situation reflète plus largement les priorités de longue date des politiques publiques qui sous-estiment la contribution de la culture aux processus d’apprentissage. Un changement de paradigme est ainsi nécessaire pour permettre l’émergence de sociétés agiles, adaptatives et innovantes.
Les sociétés d’aujourd’hui sont de plus en plus interconnectées et interdépendantes. À travers la mondialisation, l’urbanisation et la migration, la diversité culturelle est devenue une composante intrinsèque à nos sociétés, générant de vastes opportunités pour la créativité et l’innovation et élargissant les interactions entre les cultures. Par ailleurs, le paysage mondial est de plus en plus complexe, incertain et précaire, marqué par des disparités sociales et économiques qui exacerbent les divisions, les tensions et les conflits. Les défis mondiaux liés aux migrations et au changement climatique menacent la paix dans certaines parties du monde, à la fois au sein des pays et entre eux. La transformation numérique élargit les opportunités en matière d’emploi, d’apprentissage, de dialogue et d’expression créative, mais ne bénéficie pas à tous de façon équitable. Si les pays s’efforcent de s’adapter à l’ampleur et à la rapidité des avancées technologiques, la communication numérique, l’intelligence artificielle et la biotechnologie soulèvent des préoccupations profondes en matière d’éthique et de gouvernance. Alors que le monde est de plus en plus connecté, les inégalités et la pauvreté menacent la paix et la durabilité. Ces défis ont révélé les failles dans les systèmes éducatifs et les compétences, qui sont insuffisamment adaptés aux défis sociétaux. Les systèmes éducatifs doivent développer les capacités et compétences nécessaires à l’adaptabilité, l’agilité, l’inclusion, la responsabilité sociale et la citoyenneté globale. Une adaptation volontariste des politiques publiques s’impose pour forger des systèmes éducatifs holistiques qui (i) tiennent compte du contenu et des résultats de l’apprentissage, de la pédagogie et de l’environnement d’apprentissage dans des contextes formels, non formels et informels ; (ii) qui permettent aux apprenants de se transformer eux-mêmes et de transformer la société ; (iii) qui contextualisent l’apprentissage en l’adaptant aux besoins locaux et aux réalités culturelles ; (iv) qui intègrent des pédagogies fondées sur les valeurs qui encouragent des valeurs universellement partagées, telles que la non-discrimination, l’égalité, le respect et le dialogue ; et (iv) qui s’engagent, enfin, à promouvoir une éducation inclusive.
Le programme d’É»å³Ü³¦²¹³Ù¾±´Ç²Ô à la citoyenneté mondiale de l’UNESCO (ECM) défend ces mêmes valeurs qui favorisent l’éducation à la paix et aux droits de l’homme, la prévention de l’extrémisme violent par l’éducation, l’enseignement de l’Holocauste et du génocide, ainsi que la promotion du multilinguisme, des composantes centrales du Programme et du Cadre d’action É»å³Ü³¦²¹³Ù¾±´Ç²Ô 2030, en particulier de la cible 4.7 du Programme 2030.

De nouvelles capacités et compétences sont nécessaires pour faire face à ces changements et construire des sociétés inclusives, pacifiques et durables. Le renforcement des synergies entre la culture et l’éducation permet de mieux préparer les sociétés – par le biais de l’éducation formelle et informelle, notamment la formation technique et professionnelle, ainsi que l’apprentissage tout au long de la vie – afin d’être plus agiles et résilientes dans un contexte en évolution rapide. Développer des aptitudes créatives dans les domaines culturels et artistiques ouvre des opportunités pour exercer un métier dans l’économie créative mais aussi, plus largement, forger des compétences d’adaptation et d’innovation indispensables dans d’autres secteurs. La culture enrichit le système éducatif en lui permettant de renforcer la pertinence de ses contenus et de mieux s’adapter au contexte. La culture doit donc être considérée comme une ressource pour enrichir la pédagogie, les contenus éducatifs et les contextes d’apprentissage. Elle relie les individus à leur histoire et à leur patrimoine, leur permet de donner un sens, stimuler la confiance en soi et développer des qualités d’empathie et d’esprit critique. De même, l’éducation soutient les activités, les emplois et les institutions liés à la culture. Cette co-dépendance de la culture et de l’éducation est essentielle au développement humain et fait progresser plusieurs domaines de développement de manière transversale. Elle contribue à la fois à atteindre les objectifs de développement durable (ODD) et à surmonter les obstacles dans la mise en œuvre des ODD, en renforçant la durabilité des processus de développement.
Maximiser le mandat de l'UNESCO dans les secteurs de la culture et de l'éducation
L’UNESCO est la seule agence des Nations Unies disposant d’un mandat dans les domaines de la culture et l’éducation ; celui-ci s’inscrit dans la qui affirme que la culture et l’éducation sont essentielles pour la dignité de l’humanité. Dans le domaine de l’éducation, l’UNESCO axe notamment son action autour de trois axes stratégiques, qui contribuent au plaidoyer en faveur des liens entre culture et éducation : conduire les efforts mondiaux pour atteindre l’Objectif de développement durable 4 sur une éducation de qualité pour tous ; stimuler la réflexion globale sur la connaissance et l’avenir de l’éducation ; promouvoir l’éducation au développement durable (EDD) et l’éducation à la citoyenneté mondiale (ECM). A travers ces efforts, l’UNESCO encourage l’éducation de qualité pour tous en assurant la coordination mondiale de l’ODD 4 et en contribuant à faire émerger une nouvelle vision mondiale pour l’éducation en écho au Programme 2030 pour le développement durable. Lancée en septembre 2019, la Commission « Les futurs de l’éducation : apprendre à devenir » déploie un large processus consultatif pour explorer la façon dont la connaissance et l’apprentissage peuvent forger l’avenir de l’humanité et de la planète, et reconnaît la diversité culturelle comme une caractéristique fondamentale des sociétés. En tant qu’agence des Nations Unies en charge de l’É»å³Ü³¦²¹³Ù¾±´Ç²Ô au développement durable (EDD), l’UNESCO assure la gestion, la coordination, la mise en Å“uvre et le suivi du cadre mondial de l’EDD pour 2030, et soutient la culture en tant que composante importante qui nourrit les dimensions cognitives, sociales, émotionnelles et comportementales de l’apprentissage. Fournir aux apprenants de tout âge les compétences et l’ensemble des aptitudes nécessaires pour devenir des citoyens informés, engagés et empathiques sont des priorités centrales du travail de l’UNESCO dans le cadre de l’ECM, qui soutient les États membres dans le développement de politiques éducatives, de contenus, de pratiques d’enseignement et d’environnements d’apprentissage appropriés. L’Organisation assure également le suivi des avancées au regard de la cible 4.7.1, par le biais de la mise en Å“uvre de la Recommandation de 1974 sur l’éducation pour la compréhension, la coopération et la paix internationales et l’éducation relative aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, pour laquelle un groupe de travail a récemment été créé.
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L’éducation s’inscrit également, de façon transversale, dans le cadre normatif de l’UNESCO en faveur de la culture, destiné à soutenir la promotion de la diversité culturelle, renforcer la conservation du patrimoine et élargir les horizons créatifs. La Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle (2001) encourage la diversité linguistique, l’accès équitable aux technologies numériques et réaffirme qu’une éducation respectant l’identité culturelle est une garantie pour le respect des droits culturels. Toutes les Conventions culturelles de l’UNESCO ont des composantes liées à l’éducation, offrant ainsi une assise normative solide pour favoriser les synergies entre ces deux domaines. Dans le cadre de la Convention pour la protection du patrimoine culturel et naturel, le (WHE) a été créé pour fournir aux jeunes la connaissance, les capacités et les réseaux nécessaires à l’implication dans la protection et la conservation du patrimoine par le biais de diverses activités et initiatives, notamment des forums de jeunes, du volontariat international, des kits pédagogiques et des formations au renforcement des capacités. L’intégration du patrimoine culturel immatériel - ou patrimoine vivant - dans l’éducation formelle et non formelle permet de renforcer les liens avec les communautés locales, contribuant ainsi aux stratégies de sauvegarde dans le contexte de la Convention de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. L’UNESCO a intensifié son engagement dans ce domaine en lançant récemment , qui offre une plateforme en libre accès rassemblant outils, ressources et études de cas du monde entier. L’éducation occupe également une place croissante dans la mise en œuvre de la Convention de 2005 sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, qui souligne notamment l’importance de l’inclusion de la culture dans les services éducatifs en relation avec le développement durable. De même, le rôle de l’éducation est mis en avant dans les , approuvées en 2017. La fonction pédagogique des musées est au cœur de la Recommandation de 2015 concernant la protection et la promotion des musées et des collections, de leur diversité et de leur rôle dans la société, qui souligne également le rôle des musées dans l’élaboration de la politique éducative. Ces instruments invitent les pays à veiller à ce que la culture et l’éducation contribuent directement à la promotion des droits humains, du développement et de la paix.
L’UNESCO plaide en faveur d’une approche interdisciplinaire et intersectorielle de la culture et de l’éducation pour renforcer la qualité de l’éducation et faire en sorte que les systèmes éducatifs dotent les apprenants de connaissances, d’aptitudes, d’attitudes de valeurs et de comportements adéquats. Cette approche se déploie autour de quatre axes de travail : enrichir les contenus éducatifs et les approches à travers la culture ; promouvoir le respect de la diversité culturelle basée sur les droits humains ; élargir les perspectives du développement durable ; et favoriser et renforcer les capacités d’adaptation. La coopération est renforcée dans ces domaines afin de fournir un appui stratégique et un soutien technique. L’enjeu est également de renforcer le rôle des institutions culturelles et des musées en tant qu’espaces d’éducation non formelle et d’apprentissage tout au long de la vie, et notamment les programmes éducatifs liés aux Conventions et Recommandations de l’UNESCO en matière de culture.
Malgré cette dynamique, le potentiel lié à l’alliance entre la culture et l’éducation reste méconnu et insuffisamment mis en valeur. Les systèmes éducatifs peinent parfois à s’adapter de façon agile aux besoins sociétaux et à un contexte en évolution rapide. Les systèmes d’éducation formels et informels peuvent faire l’objet de perceptions différenciées ou d’une hiérarchisation. Dans certains pays, des tensions peuvent émerger entre culture et éducation en lien avec les systèmes établis pendant la période coloniale. Les politiques éducatives tendent également à s’adapter avec retard à l’évolution de l’environnement et des sociétés. La culture n’est souvent pas assez mise en valeur dans les processus d’apprentissage, les contenus et les pédagogies. De même, la culture et les arts sont souvent marginalisés dans les systèmes éducatifs ou perçus comme un luxe, une perception reflétée dans la volonté et l’investissement des politiques publiques, et ce malgré les retombées économiques évidentes des secteurs culturels et créatifs à travers le monde. Les éducateurs, eux-mêmes, manquent parfois de la formation nécessaire pour construire une pédagogie qui prenne pleinement en compte les dimensions culturelles et s’en nourrisse pour garantir la pertinence et la signification de l’enseignement. Pourtant, la vision même du progrès des sociétés s’est inscrite, historiquement, dans les avancées éducatives et culturelles, favorables à la pensée critique et garantissant l’équilibre entre progrès technologique et développement humain. Au regard de ces enjeux, des efforts concertés doivent être déployés pour renforcer l’approche globale et la pertinence des systèmes éducatifs et garantir l’accès des personnes de tous âges aux outils et pédagogies nécessaires pour s’épanouir dans les sociétés contemporaines et pour construire leur avenir.
Repenser le lien entre culture et éducation
Développer des synergies entre la culture et l’éducation permet de réévaluer les cadres pédagogiques traditionnels et d’ouvrir des perspectives nouvelles pour l’apprentissage. L’éducation est par essence culturelle, étant influencée par l’environnement, l’histoire, l’identité et la culture. La culture renforce, d’une part, la pluralité et la richesse des processus d’apprentissage, des espaces et des approches pédagogiques, et assure une éducation complète et adaptée au contexte. L’éducation est, par ailleurs, un moteur puissant pour renforcer la connaissance des cultures, promouvoir la diversité culturelle et soutenir l’emploi, l’innovation et la pensée critique. Renforcer les bénéfices mutuels de la culture et de l’éducation permet de faire progresser les objectifs de développement individuels et collectifs.
L’impact de la culture sur l’éducation a été largement démontré ; la culture améliore la qualité de l’éducation et favorise les résultats d’apprentissage, permettant ainsi de répondre aux divers besoins et approches en matière d’apprentissage. La culture permet de contextualiser l’éducation, de la rendre plus pertinente ; elle améliore par ailleurs les résultats éducatifs, les capacités de réflexion critique et la motivation en faveur de l’apprentissage. L’intégration de la diversité linguistique aux curricula suscite également des bénéfices en matière d’apprentissage. Au Mozambique, la reconnaissance des langues nationales, la culture et l’histoire ont été intégrées à la loi nationale sur l’éducation en 2018. La diversité linguistique permet d’inclure les peuples autochtones dans l’éducation, comme au Belize, où trois lycées communautaires ont été créés pour la transmission de la langue, des pratiques culturelles et des croyances mayas et garifunas. Les systèmes de connaissances autochtones, l’éducation interculturelle, la diversité culturelle, l’éducation artistique et l’éducation au patrimoine s’appuient sur les dimensions croisées de la culture et de l’éducation, et peuvent offrir des pistes pour intégrer des programmes d’éducation culturelle dans le cadre de l’éducation formelle.
L’apprentissage n’est plus exclusivement circonscrit au cadre formel de l’école. Il peut être accessible en ligne, dans les institutions culturelles comme les musées, à travers le tourisme culturel, ou au sein des communautés locales par le biais de l’apprentissage intergénérationnel, entre autres. L’UNESCO a élargi l’offre éducative grâce à son partenariat de travail avec Massive Online Open Courses (MOOC) et Coursera, proposant des cours professionnels dans des domaines allant de la gestion touristique des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO à l’apprentissage des technologies de l’information et de la communication (TIC) à l’attention des enseignants, entrepreneurs et décideurs. En tant que centres d’éducation formelle et informelle, les musées s’affirment, de façon croissante, comme des espaces de transmission culturelle et de dialogue interculturel et intergénérationnel. En Chine, par exemple, l’éducation muséale est intégrée dans les systèmes d’enseignement primaire et secondaire, alors qu’en Indonésie, est un partenaire clé de l’éducation et de la formation non formelles dans le domaine du textile batik, contribuant ainsi à la durabilité de cette pratique. Cette tendance reflète également la reconnaissance croissante du rôle pédagogique des musées dans le monde, non seulement en tant qu’espaces d’éducation non formelle et d’apprentissage tout au long de la vie, mais aussi dans leur capacité à susciter le débat et à encourager le public à se questionner sur les questions sociétales et à développer une pensée critique. Au Mali, la Direction nationale du patrimoine culturel (DNCP) contribue à sensibiliser les jeunes au patrimoine culturel par des visites guidées éducatives de sites et d’espaces culturels. L’intégration des dimensions culturelles dans l’éducation permet d’élargir les sites, environnements et acteurs de l’apprentissage. De façon générale, l’évolution de la nature et de la finalité de l’éducation démontre que l’apprentissage est, aujourd’hui plus que jamais, un processus continu, les sociétés ayant besoin de connaissances et de compétences pour s’adapter à un environnement en évolution continue.
Sauvegarder le patrimoine vivant permet également d’ancrer la diversité dans les approches et systèmes pédagogiques. Dans le cadre du projet UNESCO-UE « Enseigner et apprendre avec le patrimoine vivant » déployé par 10 équipes d’écoles du Réseau des écoles associées de l’UNESCO au sein de l’Union européenne, un ensemble de ressources et de documents d’orientation destinés aux enseignants ont été produit. Ce type d’efforts illustrent les liens étroits entre culture et éducation permettent d’élargir la portée et la variété des approches pédagogiques au travers de l’investissement dans la culture. Les expériences mises en œuvre par les États membres à travers le monde reflètent des voies alternatives pour intégrer la culture dans l’éducation formelle, non formelle et informelle, suscitant un effet multiplicateur qui bénéficie à la fois à l’éducation et aux stratégies de sauvegarde du patrimoine. Cette approche permet notamment de renforcer l’éducation communautaire et les initiatives locales, favorisant ainsi le lien avec les communautés et environnements locaux. Si ces expériences reflètent une tendance à la diversification de l’éducation, elles demeurent toutefois insuffisamment documentées et valorisées.
L’accès en ligne à la culture – des sites internet de musées aux médias sociaux, en passant par la télévision ou la radio – a ouvert de nouvelles voies pour l’apprentissage et le partage de la culture, tout en élargissant l’accès aux contenus et ressources éducatives en ligne. Par exemple, les femmes artisanes Hmong du nord de la Thaïlande ont bénéficié d’une formation aux compétences numériques et à l’entrepreneuriat pour faciliter la sauvegarde de leur patrimoine vivant grâce au projet de l’UNESCO « les femmes cyber-inspirent la culture » (« Women e-nspire Culture » en anglais). Dans le contexte de la pandémie, de nombreuses initiatives ont vu le jour pour assurer la continuité de l'apprentissage en ligne, contribuant ainsi à accélérer les transitions numériques. Depuis son lancement au début de la pandémie, la plateforme , lancée par le ministère jordanien de la culture, a proposé 150 cours d’arts visuels, de musique, d’artisanat, de théâtre, de prose et de poésie. Malgré les progrès significatifs réalisés grâce aux technologies numériques, l’accès aux avantages du numérique demeure largement inégal, un déficit qui a été particulièrement mis en évidence pendant la pandémie.
Stimuler la créativité et l’innovation sera une condition essentielle pour le marché de l’emploi de demain. La dimension culturelle de l’éducation est cruciale pour développer ces compétences, tout en élargissant les opportunités d’emploi et de croissance économique. Lier les arts et le patrimoine à l’environnement éducatif non formel par le biais de la formation professionnelle permet de stimuler les moyens de subsistance, tout en impliquant les communautés et en favorisant leur appropriation de la culture locale. Pour faire face au manque de reconnaissance professionnelle des spécialistes du patrimoine, l’UNESCO a élaboré un « cadre de compétences pour la gestion du patrimoine culturel » afin de guider les universités dans la conception de normes de qualification, de programmes de formation et de programmes d’études en matière de gestion et de conservation du patrimoine culturel. La contribution de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels (EFTP) au développement des professions et des compétences culturelles ne peut être sous-estimée. De la conception graphique à la création de sites internet, en passant par la musique et la mode, l’EFTP peut fournir aux jeunes des compétences importantes en matière d’entrepreneuriat, tout en contribuante à la vitalité de l'économie créative. de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s’attellera cette année à mesurer l'innovation et la créativité des élèves, témoignant ainsi d’une reconnaissance croissante de l’importance de ces compétences transversale dans le cadre des politiques publiques au sens large.
24 millions d’enfants et de jeunes risquent de ne pas reprendre leurs études en raison de l’impact économique de la crise (UNESCO)
L’éducation artistique peut être un catalyseur important à la fois pour développer ces compétences et pour faire progresser les résultats en matière d’éducation dans d’autres domaines du curriculum scolaire. À cet égard, l’UNESCO met en avant deux approches principales : apprendre les arts et apprendre par les arts. Au cours des dernières décennies, ces efforts ont été renforcés ; le rapport Faure en 1972 et la série de rapports mondiaux sur la culture mondiale ont constitué des tournants importants dans la compréhension et la reconnaissance des interactions entre l’éducation, les arts, la créativité et la culture. Entre 1999 et 2010, l’élan mondial en faveur de l’éducation artistique a été ponctué par deux conférences mondiales sur l’éducation artistique, l’élaboration de la feuille de route de l’éducation artistique de l’UNESCO en 2006 et de l’Agenda de Séoul en 2010. Plus récemment, les résolutions adoptées par la Conférence générale de l’UNESCO sur la Journée mondiale de l’art et sur l’éducation artistique ont servi à renforcer « les liens entre les créations artistiques et la société, et [...] à souligner la contribution des arts au développement durable". En avril 2021, le Conseil exécutif de l’UNESCO a approuvé la décision des Émirats arabes unis intitulée « un cadre pour la culture et l’éducation artistique » qui vise à renforcer la coopération entre culture et éducation dans différents domaines, du patrimoine aux industries culturelles et créatives (ICC), y compris les technologies numériques
L’éducation culturelle et artistique est essentielle pour la protection des droits culturels et la construction de sociétés inclusives. La culture et l’éducation peuvent être un moyen de faire face aux inégalités sociales, économiques et de genre, et de lutter contre les stéréotypes, l’extrémisme et la discrimination. Au Myanmar, le gouvernement a pris des mesures importantes en vue de réformer les programmes scolaires, en contrepoint des décennies précédentes qui ont vu l’éducation être instrumentalisée pour supprimer la diversité ethnique. Vivre ensemble avec d’autres cultures est une compétence requise dans des sociétés plurielles pour faire progresser les droits de l’homme et poser les bases d’un développement pacifique, inclusif et durable - une approche qui a notamment été déployée aux niveaux régional et sous-régional. La stratégie sur la culture et l'éducation de la Coordination éducative et culturelle d’Amérique centrale (CECC/SICA) lancée en 2020 vise à guider les pays de la région dans l’élaboration de modèles éducatifs intégrant la culture pour une coopération et une intégration durable et pacifique. Dans des contextes d’insécurité, de fragilité et de tensions politiques et sociales, la culture peut amplifier le pouvoir transformateur de l’éducation. Dans le Sahel, la culture est un puissant levier pour renforcer la pertinence de l’éducation dans les pays, par exemple en engageant des contenus locaux dans l’enseignement. Plus largement, en Afrique, l’éducation adaptée à la culture a été reconnue comme un moyen de faire face aux tensions et stigmates liés aux répercussions de la colonisation, tout en se tournant vers l’avenir et en valorisant le potentiel du continent.
La culture et l’éducation relient les apprenants à leurs communautés, leur patrimoine et leur environnement, renforçant ainsi l’identité culturelle et le sentiment d’appartenance. De l’éducation de la petite enfance à l’apprentissage tout au long de la vie, cette alliance favorise l’appréciation de la diversité culturelle, de l’expression créative, du patrimoine et de l’environnement. À travers le monde, certains pays abordent cette question par le biais des systèmes éducatifs formels ou informels. Le Japon s’est ainsi engagé de longue date à intégrer le patrimoine dans le système national d’éducation formelle, et un programme d’études sur le patrimoine culturel immatériel est proposé à tous les stades de l’éducation nationale. En Algérie, de même, l’Ahellil du Gourara, inscrit sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO (2003), est enseigné dans les écoles de la région où il est pratiqué. En renforçant l’éducation de qualité par la culture, cette approche permet à la fois d’assurer des solutions durables pour la promotion de la diversité culturelle et d’améliorer la sauvegarde du patrimoine.
Le renforcement des liens entre la culture et l’éducation est également un levier employé par certains pays pour élargir la compréhension du développement durable. Le Centre de recherche artistique de l’université nationale du Costa Rica a récemment lancé un programme de sensibilisation et de renforcement des capacités sur les liens entre l’art et les ODD afin de familiariser les artistes professionnels et les étudiants avec les concepts du Programme 2030 pour qu’ils puissent mieux comprendre comment contribuer, en tant qu’artistes, au développement durable. Dans le cadre scolaire finlandais, le programme national de base de l’enseignement secondaire supérieur, introduit en 2019, intègre la culture pour le développement durable et les compétences transversales qui en découlent dans toutes les matières d’enseignement. Cet ensemble de compétences comprend notamment la culture, la créativité, l’éthique, le bien-être et l’environnement. En mars 2021, l’ONG Eco Centre DELFIN s’est associée à l’Agence de développement régional d’Herzégovine (REDAH) et à deux écoles primaires des villes de Risan, au Monténégro, et de Mostar, en Bosnie-Herzégovine, pour mettre en œuvre un l aligné sur les objectifs nationaux en matière d’éducation au développement durable. Le contenu de l’apprentissage comprenait la protection de l’environnement, les ressources naturelles et culturelles et le changement climatique, au profit de quelque 420 élèves et enseignants des deux villes.
Les villes et les autorités locales peuvent être des acteurs essentiels pour forger des solutions innovantes qui rapprochent culture et éducation. Les réseaux de villes de l’UNESCO, notamment le Réseau des villes créatives (RVCU) et le Réseau mondial des villes apprenantes (GNLC) expérimentent des voies pour renforcer les compétences et stimuler la création d’emploi en soutenant la formation professionnelle dans le secteur culturel, notamment à l’attention des populations vulnérables. Ouagadougou (Burkina Faso), ville créative d’artisanat et des arts populaires, a créé le Reemdoogo, un incubateur qui propose de la formation et des équipements pour exercer les métiers de la musique, tandis que Santos (Brésil), ville créative du film, soutient l’emploi des jeunes en situation vulnérable au travers de l’atelier créatif éco-responsable, dédié au travail du bois. De même, plusieurs villes créatives de gastronomie se sont associées dans le projet « Jeunes & Nourriture » (« Youth4food » en anglais) pour mettre en cohérence l’apprentissage avec les emplois de demain dans l’ensemble de la chaîne de valeur du secteur de la nourriture. Les villes apprenantes de l’UNESCO valorisent les centres culturels locaux en tant qu’espace d’apprentissage et de dialogue interculturel et développent des mécanismes de volontariat pour favoriser la participation des populations vulnérables, notamment les personnes âgées ou les personnes en situation de handicap, aux activités culturelles et ateliers de formation. Hangzhou (Chine) – forte de son engagement en faveur de l’apprentissage tout au long de la vie – a introduit le concept du « cycle culturel à 15 minutes », qui garantit l’accès de tous les habitants à des ressources culturelles comme les musées, les théâtres ou les bibliothèques situées dans un rayon maximal de 15 minutes à pied de leur domicile.
Les programmes d’études, ainsi que les questions liées à ces derniers, tels que les supports d’enseignement et d’apprentissage, les pratiques en classe et l’évaluation, doivent être abordés différemment et de manière systémique. Le statu quo doit être remplacé par des solutions créatives et des innovations flexibles. (UNESCO)
Compte tenu de l’évolution des besoins en matière d’éducation, les enseignants sont préparés à la diversité croissante des contextes éducatifs. Cependant, de nombreux systèmes éducatifs manquent d’enseignants expérimentés dans le domaine des arts, les enseignants ayant souvent des liens limités avec la communauté des artistes. Comme le soulignent les récentes conclusions du Conseil européen sur l’équité et l’inclusion dans l’éducation et la formation, afin de promouvoir la réussite scolaire pour tous, les enseignants doivent être dotés des aptitudes, compétences et connaissances de base nécessaires pour comprendre et combattre les inégalités éducatives et pour enseigner dans des environnements de plus en plus divers, multilingues et multiculturels. Au Pakistan, l’UNESCO a collaboré avec les départements provinciaux de l’éducation et du tourisme pour intégrer le patrimoine dans les modules d’enseignement et engager les jeunes des communautés locales autour de sites sélectionnés dans l’entreprenariat du patrimoine. Les communautés locales vivant dans le fort historique de Rohtas, un bien du patrimoine mondial de l’UNESCO, ont participé à des ateliers basés sur l’éducation au patrimoine, le développement des compétences et la formation de guides touristiques. En Équateur, les enseignants de la formation technique artistique et de la formation complémentaire artistique vont recevoir une aux industries culturelles, à l’entrepreneuriat culturel, à la gestion culturelle et à la créativité dans le cadre du cours « InnovArte : les enseignants de l’éducation artistique pour le changement"», qui sera lancé en juin 2021 en ligne.
Renforcer les synergies entre culture et éducation pour construire l’avenir
La culture et l’éducation sont les fondations du développement humain et sociétal, dont les bénéfices transversaux convergent en faveur de la mise en œuvre des 17 ODD. Lorsqu’elles sont abordées de concert, la culture et l’éducation préparent le capital humain de demain et contribuent à faire émerger des sociétés pacifiques, fortes de leur diversité culturelle, ainsi que des modèles d’éducation ancrés dans des principes durables. Ces synergies doivent être abordées de façon réciproque, en intégrant les dimensions culturelles dans l’éducation et en incorporant les approches pédagogiques et éducatives dans la sphère culturelle.
Les décideurs explorent de façon croissante des approches alternatives et innovantes pour renforcer les résultats en matière d’éducation et contribuer au développement. Cette tendance ascendante s’est accentuée au cours des dernières années, reflétant la reconnaissance croissante des bénéfices mutuels de la culture et de l’éducation par les États membres. Cet engagement croissant se manifeste au travers des processus régionaux et internationaux, notamment l’adoption de la stratégie sous régionale SICA susmentionnée, par le positionnement de la culture et de l’éducation au cœur du processus du G20 lancé sous la présidence italienne, et par un nombre croissant de décisions stratégiques des organes directeurs de l’UNESCO dans ce domaine.
L’intégration de la culture dans l’éducation devrait être reconnue, systématisée et valorisée comme une voie essentielle pour repenser l’éducation. À cet égard, les politiques publiques doivent puiser dans des contenus culturels diversifiés pour soutenir et enrichir les expériences d’apprentissage et en garantir la pertinence . La culture contribue à renforcer la connaissance, les aptitudes et les valeurs, tout en favorisant la création d’emplois et d’opportunités professionnelles, posant ainsi les bases d’un développement plus durable. Une telle perspective appelle un investissement volontariste dans la collecte et l’analyse de données afin de renforcer les politiques publiques et d’accompagner les actions sur le terrain.
Au cœur de cette démarche, les programmes éducatifs doivent tenir compte du contexte culturel et mieux y répondre, ce qui nécessite des ressources financières adaptées et le développement des capacités. Cette approche élargie des champs de la culture et de l’éducation dans le cadre de l’éducation formelle nécessite un engagement volontaristes des acteurs concernés, qui passe notamment par une collaboration interministérielle renforcée entre les ministères de l’éducation et de la culture, et la participation des acteurs et institutions culturelles tels que les musées, les artistes, les professionnels de la culture et les dépositaires des connaissances traditionnelles au sein des communautés.
Dans la continuité de l’initiative phare de l’UNESCO sur les « Futurs de l’éducation », la notion d’école doit être réinventée, en élargissant les lieux d’apprentissage pour y intégrer les institutions culturelles et les plateformes numériques. Ces réflexions suscitées par l’UNESCO impliquent tous les acteurs de la société, au premier rang desquels les enseignants, étudiants et parents d’élèves. A titre d’exemple, le réseau des écoles associées de l’UNESCO (RéSEAU) a mobilisé plus de 2 500 personnes à travers le monde entre septembre 2020 à février 2021 – des responsables éducatifs et enseignants aux élèves et leurs parents – pour construire une réflexion partagée sur l’avenir de l’éducation au développement durable (EDD) et à la citoyenneté mondial (ECM). Au-delà de l’approche conventionnelle de l’école, la transformation numérique à l’œuvre offre divers moyens et possibilités aux apprenants, par lesquelles les quatre murs de l’école ne constituent plus le cadre exclusif pour assimiler connaissances et compétences. Les nombreux acteurs engagés dans cette dynamique – notamment les musées, les plateformes numériques, ou les communautés locales elles-mêmes – doivent être reconnus et activement mis à contribution, aux côtés des enseignants, afin de soutenir l’apprentissage de tous.