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Progrès scientifiques : le Comité international de bioéthique met en garde contre les nouveaux risques de discrimination

A l’invitation du gouvernement de la République de Corée, la 20e session du Comité international de bioéthique (CIB) de l’UNESCO s’est tenue à Séoul du 19 au 21 juin 2013. La session a attiré plus de 100 participants venus de 33 pays, ainsi que de nombreux partenaires extérieurs, pour discuter des nouveaux risques potentiels de discrimination engendrés par les progrès en biomédecine. Dans ce domaine, un nouveau rapport du CIB a été adopté et sera présenté aux États membres du Comité intergouvernemental de bioéthique (CIGB) qui se réuniront au siège de l’UNESCO, les 5 et 6 septembre 2013.
Première occasion, en 2013, de célébrer le 20e anniversaire du Comité international de bioéthique (CIB) et du programme de l’UNESCO pour la bioéthique, la 20e session du CIB fut également la première fois qu’un tel évènement était organisé dans un hôpital : l’hôpital Severance de l’Université de Yonsei.
Plus que symbolique, le choix de ce lieu fut la meilleure manière d’illustrer les liens entre les pratiques dans le domaine des sciences de la vie et de la médecine et les réflexions bioéthiques du Comité, mettant ainsi en exergue le véritable rôle du Comité.
Les nouveaux risques de discrimination et les nouvelles responsabilités engendrés par les progrès en biomédecine (bio-banques ; accès aux médicaments ; transplantation et trafic d’organes, de tissus et de cellules ; neurosciences ; SIDA et nanotechnologies) étaient au cœur des débats de la 20e session qui a attiré plus de 100 participants venus de 33 pays, ainsi que de nombreux partenaires extérieurs.
PRINCIPE DE NON-DISCRIMINATION ET DE NON-STIGMATISATION
Le projet de rapport du CIB sur le principe de non-discrimination et de non-stigmatisation, tel qu'énoncé dans l'Article 11 de la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’Homme était au cœur de cette session.
Tout au long de la réunion les experts indépendants membres du CIB ont travaillé d’arrache-pied sur la révision du projet de rapport. En révisant le rapport, le Comité a décidé :
- de réitérer le potentiel discriminatoire et les conséquences stigmatisantes engendrées par la mauvaise utilisation de l’information génétique contenue dans les bio-banques ;
- de mettre en avant les maladies tropicales négligées, un sujet lié à la question de l’accès aux médicaments, comme un exemple-clé de la discrimination structurelle et de la stigmatisation sociale ;
- de se focaliser sur les effets discriminatoires et stigmatisants subis par les donneurs et les bénéficiaires de la transplantation d’organes.
Les tendances actuelles et émergentes en matière de discrimination et de stigmatisation liées au SIDA, aux nanotechnologies et aux neurosciences ont aussi été traitées dans le rapport, dont la version révisée sera présentée aux États membres du Comité intergouvernemental de bioéthique (CIGB) qui se réuniront au Siège de l’UNESCO, à Paris, les 5 et 6 septembre 2013.
BIOÉTHIQUE EN ASIE ET DANS LE PACIFIQUE: EXPÉRIENCES, PERSPECTIVES ET NOUVEAUX DÉFIS ÉTHIQUES
Parmi les autres sujets inscrits à l’agenda, une session de travail dédiée aux préoccupations bioéthiques enAsie-Pacifique a exploré deux autres thèmes : la médecine personnalisée, et les mesures législatives prises dans la région afin de mettre en pratique les principes inscrits dans les déclarations bioéthiques de l’UNESCO.
La médecine personnalisée est une approche selon laquelle les interventions médicales sont adaptées aux caractéristiques spécifiques de chaque patient et réalisées grâce à la pharmacogénomique et aux traitements fondés sur le génotype. Les bio-banques sont les outils principaux de la médecine personnalisée. A cet égard, la baisse du coût du séquençage de génome constitue un développement important.
Dans ce domaine en évolution rapide, les questions liées à l’éthique et aux droits humains sont intimement liées à la manière dont les bio-banques sont implantées et englobent des sujets tels que : le droit à l’auto-détermination (les procédures traditionnelles de consentement préalable en connaissance de cause ne sont pas applicables) ; le droit à la vie privée et à l’information personnelle, particulièrement concernant l’information génétique et les particularités génétiques des membres d’une même famille, de mêmes groupes et d’ethnies ; le droit d’avoir accès aux meilleurs soins disponibles ; le risque de discrimination et de stigmatisation d’individus et de groupes ethniques ; et le dilemme ethique que pose les découvertes fortuites.
En la matière, la recherche « ELSI » (pour « implications éthiques, juridiques et sociales » d’après son acronyme en anglais) est une exigence critique pour la poursuite du développement de la médecine génomique et doit devenir une composante essentielle des agences de financement de la recherche à travers le monde. Cette session du CIB a aussi souligné que la collaboration internationale était indispensable au succès de la recherche « ELSI », considérant, par ailleurs, que la décision récente (13 juin 2013) et unanime de la Cour suprême des États-Unis d’interdire le brevetage de gênes naturels a des implications considérables sur la médecine personnalisée.
Concernant les mesures législatives, le cas de l’Inde a fait l’objet de discussions notamment en regard des articles 14 (responsabilité sociale et santé) et 15 (partage des bienfaits) de la Déclaration universelle sur la bioéthiques et les droits de l’Homme et de la décision récente (1er avril 2013) de la Cour suprême de l’Inde de rejeter la demande d’une entreprise pharmaceutique de protéger le brevet d’une nouvelle version de son médicament contre le cancer.
Le développement de la bioéthique en Chine, qui a profité de la contribution des documents et des actions de l’UNESCO sur le développement des infrastructures de bioéthique dans le pays, a également été présenté. Il a été souligné que les principaux défis bioéthiques de la Chine sont actuellement la recherche sur les cellules souches et ses applications cliniques ; l’introduction de riz génétiquement modifié pour les jeunes écoliers chinois (la question du riz doré) ; la discrimination des gènes (en particulier concernant la thalassémie) ; et la faiblesse structurelle du Comité national de bioéthique établi dans ce pays.
Enfin, toujours dans le cadre de la discussion sur les mesures législatives mises en œuvre en Asie-Pacifique, le CIB a aussi abordé le développement de la bioéthique dans la République de Corée, y compris les mesures législatives nationales prises en matière d’avortement, de transplantation d’organes, d’essais cliniques sur l’Homme, de recherche dans le domaine des sciences de la vie, et en matière de bioéthique et de sécurité. Il a été souligné que le pays investit énormément dans la recherche en sciences de la vie, et qu’il est nécessaire que les mesures législatives s’alignent avec les développements rapides dans ce domaine.
LE PROGRAMME DE BIOÉTHIQUE DE L’UNESCO : PASSÉ, PRÉSENT ET FUTUR
Commémorant le 20e anniversaire du CIB et les une autre session a été spécialement organisée pour discuter des succès les plus marquants et des leçons tirées, partager des suggestions et des expériences sur les défis posés et réfléchir sur le rôle de la bioéthique dans le contexte de l’agenda post-2015 pour le développement durable.
Organisée pour stimuler la réflexion du CIB sur les meilleurs manières d’améliorer la pertinence et l’impact des activités de l’Organisation dans les années à venir, cette session de travail a atteint son objectif : le Comité a saisi cette occasion pour souligner le fait que le lien entre la bioéthique et les droits humains est un aspect crucial du travail du CIB et du Programme de bioéthique de l’UNESCO dans les années à venir.
Le Comité a considéré qu’il devait rester prudent par rapport aux questions émergentes qui peuvent avoir une incidence sur les principes de la dignité humaine, d’égalité et de justice. Dans ce contexte, les membres du CIB ont souligné l’importance de renforcer les infrastructures de bioéthique des États membres, à travers la création, entre autres, de comités nationaux de bioéthique. Plusieurs suggestions ont aussi été faites pour prendre en considération l’idée de faire de ces comités un indicateur mesurable dans le cadre de l’agenda post-2015 pour le développement durable.
Par ailleurs, le Comité a souligné l’importance de continuer à établir les principes de la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’Homme. Il a été réaffirmé que les actions de l’UNESCO dans le domaine de la bioéthique devaient traiter les besoins des populations vulnérables et que des sujets tels que l’accès aux médicaments, le SIDA, la distribution équitable des ressources en matière de santé(fuite des cerveaux, , etc…), ainsi que la recherche génomique, devraient rester des priorités pour l’Organisation.
Le Comité a aussi approuvé l’idée de mettre en place un réseau de jeunes spécialistes en bioéthique à travers le monde afin de promouvoir l’éducation de la prochaine génération de spécialistes en bioéthique, ainsi que leur collaboration à travers des activités telles que des cours d’été dans lesquels des membres du CIB seraient directement impliqués. Le Président du CIB, le Professeur Semplici, a également proposé d’établir une plateforme en ligne pour mettre en contact les membres anciens, présents et futurs du CIB afin de créer un large réseau de compétences sur les réflexions futures du Comité et sur les discussions concernant les nouvelles questions de bioéthique.
PROGRAMME DE TRAVAIL DU CIB POUR 2014-2015
Au cours de cette session, les experts indépendants membres du CIB ont échangé des réflexions préliminaires sur leur programme de travail pour 2014-2015. Ils ont décidé que :
- Le CIB développera l’article 15 (partage des bienfaits) de la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’Homme (DUBDH). Cet article est associé avec l’article 27 (droit de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent) de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH) et avec l’article 15 (droit de bénéficier du progrès scientifique et de ses applications) du . En outre, le Comité a décidé que son rapport abordera le sujet du partage des bienfaits et de la production de savoirs afin d’élaborer l’article 15 de la DUBDH et de contribuer à l’élaboration de la partie normative de l’article 27 de la DUDH. Ce sujet révèle que les liens entre bioéthique et justice sociale ont été identifiés comme élément-clé des objectifs post-2015 et du développement durable.
- En réponse aux rapides progrès dans les domaines de la génétique et de la génomique, le CIB mettra à jour ses réflexions sur le sujet du génome humain et des droits humains en s’appuyant sur les travaux qu’il déjà réalisés à ce sujet et en prenant particulièrement en compte la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’Homme (1997), la Déclaration internationale sur les données génétiques humaines (2003) et la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’Homme (2005). De cette manière, le CIB entend continuer à remplir sa fonction de suivi constant des progrès dans le domaine des sciences et des nouvelles questions posées par leurs avancées.
Le Comité a soutenu l’idée, mise en avant par les agences des Nations Unies travaillant dans le domaine de la bioéthique, de coordonner leurs actions autour du thème « Éthique et gouvernance des technosciences convergentes au service de sociétés ». Il a aussi exprimé sa volonté de coopérer et de collaborer activement dans le cas où cette initiative devrait se matérialiser au sein d’organisations membres du Comité inter-agences des Nations Unies sur la bioéthique (UNIACB), dont l’UNESCO assure le secrétariat permanent. Les membres du CIB ont cependant indiqué que le terme « sociétés équitables » serait plus précis pour assurer l’équité et la justice du développement durable que le terme « sociétés durables ».
La 20e session du CIB a été organisée conjointement avec le Ministère de la santé et des affaires sociales de la République de Corée, en collaboration avec la Commission coréenne pour l’UNESCO et le National Project for Personalized Genomic Medicine (PGM 21). L’événement a également été soutenu par l’Institut national coréen pour les politiques bioéthiques (KoNIPB), l’Ecole de santé publique de l’Université Yonsei, l’Institut asiatique de droit en bioéthique et en santé, la Fondation coréenne pour la santé internationale (KOFIH), et la compagnie aérienne Asiana Airlines.
La cérémonie d’ouverture s’est tenue en présence de la Sous-ministre coréenne des Politiques de Santé, Young Hyun Choiqui y a transmis un message personnel de Young Hyun Choi, Ministre de la Santé et des Affaires sociales de la République de Corée ; de Dong-seok Min, Secrétaire général de la Commission coréenne pour l’UNESCO ; de Chul Lee, Vice-président de l’Université Yonsei et Président du Yonsei University Health System; et d’Alissandra Cummins, Présidente du Conseil exécutif de l’UNESCO.
Le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, et la Directrice générale de l’UNESCO, Irina Bokova, ont envoyé aux participants des messages-vidéos qui ont été projetés à l’occasion de l’évènement.