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Ahmad Al Mahdi : la faute que j’ai commise sera la première et la dernière

Lors de son procès à la CPI, Ahmad Al Mahdi a lancé un appel le 22 août 2016 « à tous les musulmans du monde, de ne jamais commettre ce genre d’action dont les conséquences sont terribles, qui n’ont aucune justification et ne peuvent engendrer aucun bénéfice. » Nous reproduisons sa déclaration dans son intégralité.

Monsieur le Président,

Membres de cette auguste Cour

Mesdames et messieurs

Bonjour à tous,

D’emblée je voudrais me rappeler la parole d’Allah le tout-puissant : « Oh vous qui êtes croyants, observez strictement la justice et soyez des témoins véridiques quand Allah l’ordonne. Encore plus contre vous-même, contre vos pères et mères ou vos proches parents. »

Mon cÅ“ur retient également l’adage d’un sage : « Dites la vérité fusse contre vous-même. Ou encore : Attachez-vous à la vérité, quitte à subir les foudres de l’enfer. »

Mesdames et messieurs, je me tiens devant vous dans cette enceinte, plein de remords et de regrets pour confirmer à nouveau que les accusations portées contre moi par l’équipe de l’accusation sont véridiques et qu’elles sont conformes à la vérité.

Je suis fort contrit de mes actes et de tous les préjudices qu’ils ont causés. Les préjudices causés à mes proches, à mes chers frères à Tombouctou, à ma mère patrie la République du Mali tout entière, ainsi qu’à l’ensemble de l’humanité aux quatre coins du monde.

Je voudrais exprimer mon profond regret et ma profonde tristesse en particulier aux descendants des Saints dont j’ai détruit les mausolées. J’en appelle à eux, ainsi qu’aux habitants de Tombouctou pour qu’ils m’accordent leur pardon ; je leur fais la promesse, celle du croyant sincère, que la faute que j’ai commise envers eux sera la première et la dernière.

J’espère qu’ils  continueront de me considérer comme ils le faisaient avant ces événements, comme un fils pieux, un frère et un ami qui aime toutes les composantes du tissu social de Tombouctou, impliqué à leurs côtés dans de nombreuses activités positives et constructives.

J’ai espoir qu’ils accepteront, conformément à l’éthique islamique qui préconise le pardon et l’indulgence à l’égard de celui qui pèche et qui se repentit, de m’accorder le bénéfice du doute si faible soit-il. Ce faisant, ils s’élèveront au rang supérieur prôné par le Coran selon les paroles de Dieu tout puissant : Quiconque pardonne sera rétribué par Allah.

À l’époque des événements, j’étais sous l’emprise d’une bande de leaders, des figures emblématiques d’Al Qaïda et d’Ansar Dine. Ma conscience a faibli face à eux. J’avais été comme emporté par une forte tempête qui m’avait entraîné dans son sillage comme elle a entraîné de nombreux oulémas du pays. Mais comme vous le savez, cette tempête est passagère et n’altèrera pas les racines historiques profondes de la ville de Tombouctou et de sa noble population.

Mesdames et messieurs, je me tiens ici devant vous, le cœur lourd, triste et soucieux, privé de liberté et de la compagnie de mes proches et de mes êtres chers. Mais je suis prêt à accepter la sanction que votre Cour jugera appropriée.

Je ne peux m’empêcher de caresser l’espoir que votre sanction ouvrira la porte de la réconciliation avec la population de Tombouctou en particulier et avec le peuple malien en général, ainsi qu’avec l’ensemble de l’humanité.

Puissent les années que je passerai dans l’obscurité de la prison et les épreuves que je subirai, me servir de feu purificateur qui me rendra digne de la clémence des cœurs que j’ai blessés.

Il ne me reste plus qu’à adresser un conseil à tous les musulmans du monde : qu’ils ne commettent pas, jamais, ce genre d’action dont les conséquences sont terribles, qui n’ont aucune justification et ne peuvent engendrer aucun bénéfice.

Pour conclure, permettez-moi de remercier toutes les équipes de la Cour pénale internationale, qu’il s’agisse des juges, du bureau du procureur, du greffe, ou des représentants du centre de détention. Je les remercie tous de m’avoir traité conformément aux normes et aux standards du respect des droits de l’homme, ainsi que pour la probité dont ils ont fait preuve lors de mon interrogatoire. Je veux également remercier particulièrement l’équipe de défense et plus précisément Maître Mohamed Aouini qui a bien voulu m’accompagner jusqu’au bout de cette épreuve.

Je vous remercie.