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Ce qu’il faut savoir sur l'action nécessaire pour mettre fin à la violence éducative et en milieu scolaire

À l’occasion de la Journée internationale de lutte contre la violence et le harcèlement en milieu scolaire, y compris le cyber-harcèlement, le 7 novembre, l’UNESCO a publié un nouveau rapport intitulé « Safe to learn and thrive: Ending violence in and through education » [Apprendre et s’épanouir en sécurité : mettre fin à la violence éducative et en milieu scolaire]. La publication s’appuie sur de nombreuses données mondiales et des éléments factuels concernant les multiples facettes et les causes profondes de la violence en milieu scolaire pour proposer des stratégies concrètes permettant de créer des environnements d’apprentissage sûrs, inclusifs et bienveillants.
school violence and bullying

Quelles sont les caractéristiques de la violence scolaire ?

La violence scolaire est un phénomène répandu qui touche tant les apprenants que le personnel éducatif. Chaque année dans le monde, un milliard d’enfants âgés de 2 à 17 ans subissent de la violence. Celle-ci peut être physique, psychologique ou sexuelle ; il peut s’agir de violence fondée sur le genre, de harcèlement ou de cyber-harcèlement, mais aussi de violence systémique ou institutionnelle, qui va au-delà d’actes individuels. 

La violence institutionnelle survient lorsque des politiques ou des pratiques discriminatoires au sein du système éducatif désavantagent des groupes spécifiques. Par exemple, les politiques qui limitent l’accès à une éducation de qualité ou sanctionnent de manière disproportionnée les apprenants en raison de leur genre, de leur handicap ou de leur origine sociale contribuent à alimenter la violence scolaire. 

Pour bien comprendre la violence scolaire, il convient aussi de reconnaître l’influence néfaste de certaines normes sociales, qui peuvent normaliser certaines formes de violence, et de facteurs extérieurs tels que les violences locales ou sociales, qui s’infiltrent également dans les établissements scolaires. La violence en bande organisée ou les conflits armés peuvent par exemple compromettre la sécurité de l’environnement d’apprentissage et renforcer les cycles de peur et d’insécurité. Ces interactions complexes entre la société et l’école montrent la nécessité d’adopter des stratégies globales pour lutter contre la violence non seulement à l’école, mais au sein du système éducatif dans son ensemble.

Quel impact la violence scolaire a-t-elle sur l’apprentissage et au-delà ?

La violence scolaire ne perturbe pas seulement l’apprentissage ; ses répercussions vont bien au-delà de la salle de classe.

Toutes les formes de violence scolaire entravent l’apprentissage : les enfants qui subissent de la violence, sous quelque forme que ce soit, connaissent souvent des problèmes de concentration ou un retard dans leur développement cognitif. Cela affecte leurs performances scolaires et les pousse à manquer l’école, voire, dans de nombreux cas, à interrompre définitivement leur scolarité. Des études ont montré que les apprenants exposés à de la violence sont plus susceptibles d’avoir de mauvais résultats dans des domaines clés comme la lecture, l’écriture et les mathématiques, ce qui a des effets durables sur leurs performances scolaires et professionnelles.

Subir de la violence entraîne de graves troubles psychologiques et mentaux : les enfants qui subissent de la violence souffrent souvent d’anxiété, de dépression et d’une faible estime d’eux-mêmes, et ces troubles peuvent persister même à l’âge adulte. L’impact de la violence sur leur santé mentale peut fortement limiter leur capacité à nouer des relations saines et à participer pleinement à la société. Les victimes de violence sexuelle en particulier peuvent souffrir d’un trouble de stress post-traumatique ou d’autres troubles psychologiques graves qui limitent leur potentiel et leurs perspectives.

Dans de nombreuses régions, la violence sexuelle en milieu scolaire peut entraîner des grossesses précoces et non désirées, forçant les filles à quitter l’école : cela a des conséquences durables pour elles, car cela les prive d’une éducation et de perspectives économiques tout en perpétuant le cycle de la pauvreté et des inégalités. Dans les régions ne proposant pas une éducation complète à la sexualité ni de dispositifs de soutien, les effets de cette violence sont encore plus dévastateurs.

Le bien-être des enseignants et la qualité de leur enseignement sont aussi profondément affectés par la violence scolaire : près de 80 % des enseignants déclarent avoir subi de la violence, qui va de la violence verbale à des attaques physiques. Les enseignants victimes de violence souffrent de hauts niveaux de stress, ont de plus grands risques de faire un burnout et connaissent une baisse de leur satisfaction au travail, ce qui a un effet néfaste sur la qualité de l’enseignement qu’ils dispensent. Lorsque les enseignants sont démotivés ou ne se sentent pas en sécurité, c’est tout l’environnement d’apprentissage qui en pâtit.

La violence scolaire a aussi un coût économique : les problèmes d’apprentissage et la baisse des performances scolaires entraînés par la violence se traduisent par un manque à gagner en matière de revenus tout au long de la vie des victimes. À plus grande échelle, ils peuvent ralentir la croissance économique, car les travailleurs peu éduqués sont moins productifs. La violence scolaire empêche ainsi de tirer les bénéfices à long terme des investissements dans l’éducation, qui sont pourtant vitaux pour le développement et la prospérité des sociétés.

Quelles sont les causes de la violence scolaire ?

Les causes de la violence scolaire sont diverses et complexes. Elles sont liées à des facteurs sociaux, institutionnels et interpersonnels. 

Sur le plan social, la violence scolaire est souvent un reflet de problèmes sociaux plus larges tels que la pauvreté, les conflits armés ou la violence en bande organisée. Dans de nombreuses régions, la violence existant dans et entre les communautés peut s’étendre aux établissements scolaires, perturbant ainsi l’environnement d’apprentissage et contribuant à un climat de peur et d’insécurité. En Amérique latine et aux Caraïbes par exemple, près de 45 % des apprenants subissent du harcèlement, et ce problème est souvent lié au problème plus global du crime organisé et de la violence de proximité.

Sur le plan institutionnel, la violence est perpétuée par des normes de genre néfastes, des politiques discriminatoires et un climat scolaire défavorable. Les établissements scolaires peuvent par exemple avoir du mal à lutter contre la violence fondée sur le genre et la laisser perdurer parce qu’ils ne disposent pas de dispositifs de signalement adéquats ou qu’ils ne soutiennent pas assez les victimes. Les apprenants ayant une orientation sexuelle ou une identité de genre minoritaire (LGBTQ+) sont disproportionnellement touchés par le harcèlement et les intimidations, souvent parce que les écoles n’ont pas en mis en place de politiques adaptées pour protéger ces groupes vulnérables.

Sur le plan interpersonnel, la violence est alimentée par les inégalités de pouvoir, les normes sociales et de genre néfastes et des mécanismes de résolution des conflits inadéquats au sein des établissements. Les enfants qui subissent de la violence dans leur famille ou dans leur quotidien sont plus susceptibles d’avoir un comportement agressif à l’école, alimentant ainsi le cycle de la violence.

Comment tirer parti du pouvoir transformateur de l’éducation pour mettre fin à la violence ?

L’éducation a le pouvoir non seulement de prévenir la violence, mais aussi de transformer les sociétés en favorisant des environnements sûrs, inclusifs et bienveillants. 

Afin de pleinement exploiter ce potentiel transformateur, il est nécessaire de suivre une approche holistique qui intègre la prévention de la violence dans tous les aspects de l’éducation, des politiques éducatives à la formation des enseignants en passant par la conception des programmes d’enseignement et les dispositifs de signalement. À l’UNESCO, nous sommes convaincus que favoriser des environnements d’apprentissage sûrs est essentiel pour que les apprenants s’épanouissent au niveau scolaire, émotionnel et social. 

Dans ce contexte, la  est un document clé qui définit un cadre d’action. Elle souligne que les systèmes éducatifs doivent activement promouvoir la paix et les droits humains et affirme qu’un environnement scolaire sûr et inclusif n’est pas un simple objectif, mais un aspect fondamental de l’apprentissage. Pour concrétiser cette vision, les systèmes éducatifs doivent :

  • Adopter des politiques claires de lutte contre la violence : les établissements scolaires doivent disposer de politiques efficaces qui couvrent toutes les formes de violence, y compris le harcèlement, les châtiments corporels et la violence en ligne. Ces politiques doivent être appliquées dans tous les établissements et assorties de solides mécanismes de responsabilisation garantissant leur respect et prévoyant des conséquences en cas de non-conformité.
  • Former les enseignants à prévenir et à traiter les cas de violence : les enseignants sont en première ligne pour prévenir la violence. Ils doivent donc être continuellement formés à la discipline positive, à la pédagogie tenant compte du genre et à la résolution de conflits. Donner aux enseignants des stratégies d’apprentissage socio-émotionnel aide à instaurer un climat scolaire positif dans lequel les élèves développent leur empathie et leur intelligence émotionnelle et apprennent à communiquer de manière non violente.
  • Donner aux élèves les moyens d’être acteurs du changement : les apprenants devraient activement contribuer à rendre leurs établissements scolaires plus sûrs. Les programmes menés par des pairs, les conseils d’élèves et les campagnes contre le harcèlement permettent aux apprenants de faire entendre leur voix et de faire advenir des changements positifs. Les faire participer aux processus de prise de décisions permet de les rendre co-créateurs des environnements d’apprentissage inclusifs dans lesquels ils sont amenés à évoluer.
  • Nouer des partenariats avec les communautés, les gouvernements et le secteur privé : la collaboration est essentielle. Les gouvernements doivent renforcer les liens entre les systèmes éducatifs et les systèmes de protection de l’enfance, tandis que les entreprises technologiques peuvent contribuer à rendre les espaces numériques plus sûrs. Les communautés, y compris les parents, doivent participer aux efforts de prévention de la violence afin qu’ils aillent au-delà de l’environnement scolaire.
  • Intégrer l’apprentissage social et émotionnel : intégrer l’apprentissage social et émotionnel dans les programmes d’enseignement aide les apprenants à gérer leurs émotions, à nouer des relations positives et à résoudre les conflits sans violence. L’apprentissage social et émotionnel est crucial pour créer une culture de respect et d’inclusion et ainsi réduire le risque de violence scolaire.
  • Allouer des ressources adéquates : la prévention de la violence nécessite des investissements. Les gouvernements et les autorités éducatives doivent allouer des ressources suffisantes à la formation des enseignants, la sécurité des infrastructures, la création de services de santé mentale et la mise en place de systèmes de signalement dans les établissements. Un financement à long terme est crucial pour pérenniser ces efforts.
  • Suivre, évaluer et responsabiliser : les établissements scolaires doivent disposer de systèmes efficaces pour évaluer l’efficacité des programmes de prévention de la violence. Collecter des données ventilées, par exemple, permet de détecter les lacunes et de mettre au point des interventions répondant aux besoins de tous les élèves, en particulier les plus vulnérables. Un suivi régulier permet une amélioration continue et une responsabilisation des établissements.

Que pouvez-vous faire pour aider à mettre fin à la violence scolaire ?

Tout le monde, dans la communauté éducative et au-delà, a un rôle à jouer pour mettre fin à la violence, et cela inclut les apprenants, les enseignants, les établissements scolaires, les décideurs politiques, les communautés, et même le secteur privé, en particulier les entreprises technologiques.

Les apprenants peuvent être de puissants acteurs du changement. Ils peuvent par exemple participer à des programmes menés par des pairs qui promeuvent des comportements positifs et l’intervention des témoins de violence ou luttent contre le harcèlement. Dans le cadre de conseils d’élèves, de groupes de plaidoyer et de campagnes contre la violence, ils peuvent exiger des établissements scolaires plus sûrs, plus inclusifs et plus égalitaires. Ils peuvent aussi participer aux processus de formulation des politiques et y exprimer leurs idées pour créer des environnements où tout le monde se sent respecté et en sécurité. 

Les enseignants et les autres membres du personnel des établissements scolaires ont un rôle crucial à jouer pour détecter les signes précurseurs de violence et prendre des mesures préventives. S’ils sont formés à la discipline positive et à la prévention de la violence, les enseignants peuvent intervenir en amont pour protéger les élèves et créer des environnements d’apprentissage bienveillants. Au-delà de la prévention, les enseignants doivent aussi favoriser l’égalité des genres et l’inclusivité dans leur salle de classe et contribuer à remettre en question les normes néfastes qui perpétuent la violence.

Les établissements scolaires et les décideurs politiques doivent mettre en place des politiques claires de lutte contre la violence ainsi que des mécanismes de signalement accessibles et fiables pour tous les apprenants. Les établissements doivent notamment favoriser une culture scolaire dans laquelle les apprenants peuvent signaler sans risque des cas de violence et où ces cas sont ensuite traités de manière adéquate. Ils doivent aussi proposer aux apprenants des espaces sûrs où ceux-ci peuvent faire part de leurs préoccupations et participer activement aux décisions qui les concernent. Les décideurs politiques doivent adopter des lois et des politiques nationales, par exemple pour bannir les châtiments corporels, et veiller à leur respect afin de créer une base solide pour des établissements scolaires sans violence.

Les membres des communautés locales, y compris les parents et les gardiens des apprenants, ont un rôle important à jouer pour transmettre des valeurs positives aux enfants dans leur foyer et aider les établissements scolaires à créer des environnements d’apprentissage non violents. Ils doivent demander des programmes de prévention de la violence efficaces et exiger des établissements scolaires qu’ils garantissent la sécurité des apprenants.

Les entreprises du secteur privé ont elles aussi un rôle à jouer dans la prévention et la lutte contre la violence en ligne. Dans un contexte de recours accru aux plateformes numériques pour l’apprentissage, les entreprises technologiques doivent prendre leurs responsabilités et créer des espaces en ligne plus sûrs. Elles doivent notamment développer des outils permettant de prévenir et de traiter les cas de cyber-harcèlement, promouvoir l’alphabétisation numérique et créer des plateformes sur lesquelles les apprenants peuvent apprendre et interagir sans risquer d’être harcelés ou de subir d’autres formes de violence. Les entreprises doivent notamment collaborer avec les enseignants pour intégrer des garde-fous aux environnements d’apprentissage numériques afin de permettre aux apprenants de profiter d’espaces en ligne sûrs, bienveillants et inclusifs.

En travaillant tous ensemble, les apprenants, les enseignants, les décideurs politiques, les communautés locales, les entreprises technologiques, le secteur privé, toute la société peut contribuer à faire des établissements scolaires et des espaces d’apprentissage numériques des environnements où chacun se sent respecté et en sécurité et dispose de tout ce dont il a besoin pour apprendre et s’épanouir.

Apprendre et s’épanouir en sécurité : mettre fin à la violence éducative et en milieu scolaire
UNESCO
2024

(en anglais)

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