Module 4 : Compétences en éducation aux médias et à l’information pour contrer la mésinformation, la désinformation et les discours de haine
Le mensonge vole, et la vérité ne le suit qu’en boitant, de telle sorte que lorsque les hommes en arrivent à ouvrir les yeux, c’est un quart d’heure trop tard. La farce est finie, et le conte a produit son effet : comme un homme qui ne pense à une bonne répartie qu’après un changement de sujet, ou lorsque la compagnie s’en est allée ; ou tel le médecin ayant découvert un médicament infaillible une fois son patient décédé.
Contexte et raison d’être
La recherche de la vérité est l’histoire de l’humanité. Ces dernières décennies, nous avons assisté à des innovations sans précédent en matière de technologies de l’information et de la communication (TIC), qui ont été d’une rapidité et d’une portée jusqu’ici inimaginables. Mais de telles inventions et innovations n’ont pas toujours fait avancer la recherche de la vérité. En fait, les propos de l’écrivain anglo-irlandais Jonathan Swift au XVIe siècle résonnent encore aujourd’hui : « Le mensonge vole, et la vérité ne le suit qu’en boitant ». L’étude sur Twitter réalisée en 2018 par le Media Lab du Massachusetts Institute of Technology (MIT) valide la satire de Swift en concluant que « les mensonges circulent plus loin, plus vite, plus profondément et plus largement que la vérité dans toutes les catégories d’information. » (Vosoughi, Soroush et Roy, Deb et Aral, Sinan. (2018). The spread of true and false news online. Science. 359. 1146-1151. 10.1126/science.aap9559)
Ce module sur l’application des compétences en EMI pour lutter contre la mésinformation et les discours de haine se divise en deux grandes parties. Il examine en premier lieu les différents types de mésinformation qui envahissent l’ère dite de la post-vérité. Il illustre ensuite la façon dont la mésinformation peut engendrer la méfiance, la division et l’intolérance. Ce module renforce plusieurs des modules précédents en décrivant au lecteur la manière dont les outils et les compétences en EMI peuvent être mis à contribution pour rechercher et défendre la vérité, prévenir la diffusion de fausses informations et créer une société inclusive, participative et ouverte.
Il utilise le terme « mésinformation » comme terme générique, mais il opère également la distinction, à un autre niveau, entre désinformation, mésinformation et information malveillante, dont les théories du complot. Il réfute le terme populaire de « fake news » en désignant ce dont il s’agit vraiment : des contenus faux ou trompeurs. L’UNESCO décourage en effet l’emploi du terme « fake news », dans la mesure où, si un contenu est faux, il ne peut s’agir d’une information. Les éducateurs et les apprenants doivent étudier attentivement la mésinformation pour les nombreux préjudices qu’elle a causés et continue de causer aux individus et aux sociétés. On peut citer parmi ceux-là la méfiance généralisée vis-à -vis des médias d’information factuels, de la science et des institutions établies, la montée des discours de haine, de l’intolérance et de la polarisation, la perturbation des processus démocratiques (en particulier des élections libres), l’entrave à la réalisation des objectifs de développement durable et, dernièrement, l’émergence d’une « désinfodémie » par rapport à la crise du coronavirus qui submerge le monde au moment de la rédaction du présent programme. Et ce ne sont là que quelques-uns des préjudices provoqués par la mésinformation.
En second lieu, ce module permet de comprendre comment la couverture de l’actualité et l’information peuvent être corrompues et engendrer la méfiance, la division, l’intolérance et les préjugés entre les individus et au sein des sociétés. Il examine la perception selon laquelle les médias de masse et les réseaux sociaux sont des « plateformes de choix » pour la propagation des discours de haine, de la discrimination, des mythes ou des théories du complot, de la radicalisation et de l’extrémisme violent.
L’EMI fournit les compétences et les outils qui nous permettent d’éviter la propagation de fausses informations et de repousser les propagateurs de tromperie et d’intolérance et les modèles commerciaux numériques qui amplifient ces contenus et les liens entre ceux qui les font circuler. L’EMI permet aux apprenants (1) d’identifier la mésinformation et les contenus dangereux, (2) de les réfuter grâce à la vérification des faits, (3) lorsque nécessaire, de les contrer sans les amplifier davantage en les signalant et/ou par le biais de contre-messages. Ce module présente des outils et des applications de vérification des faits qui peuvent être inclus dans une boîte à outils d’EMI. (engagement 7, action 20), soulignent la nécessité d’utiliser l’éducation comme outil de lutte contre les discours de haine en promouvant les valeurs et les compétences de l’éducation à la citoyenneté mondiale et en renforçant l’éducation aux médias et à l’information. associe à son tour le discours de haine à la désinformation tout en encourageant des réponses axées sur la réflexion critique, les aptitudes sociales et émotionnelles et l’engagement responsable, par le biais de la citoyenneté mondiale et de l’éducation aux droits de l’homme. L’EMI renvoie à la réflexion critique et à la sensibilisation à la citoyenneté mondiale et aux droits de l’homme dans le but de lutter contre la mésinformation.
La manière dont les programmes d’EMI encouragent l’inclusion, l’égalité des genres, la diversité et le pluralisme est également essentielle pour lutter contre la mésinformation. Une EMI sensible au genre favorise la recherche de la vérité sur le rôle des femmes dans les évolutions sociales à travers le monde. Par exemple, la communication interculturelle (interethnique) et les dialogues interreligieux peuvent aider à lutter contre la masculinité toxique, la discrimination, les représentations stéréotypées et les préjugés. L’EMI peut contribuer à renforcer les opinions à partir de multiples points de vue et de la maîtrise des connaissances historiques. Au cours des dernières décennies, nous avons assisté à des percées technologiques qui, dans certains cas, ont également conduit à des énigmes technologiques, à des silos informationnels et même à des ruptures éthiques.