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Des professionnels du judiciaire en Afrique s’expriment sur un cours sur la liberté d’expression

L’UNESCO a mené des interviews avec deux participants à un cours en ligne gratuit et en français, intitulé « », destiné aux acteurs du judicaire en Afrique.
Pourriez-vous vous présenter et nous dire pourquoi vous avez décidé de participer à ce cours en ligne ?
Béatrice Yameogo Sanon, magistrate : Je suis madame Béatrice Yameogo Sanon, magistrate, présentement conseillère à la Cour d’Appel de Ouagadougou au Burkina Faso.
Le ministère de la Justice a un fichier avec les courriels des magistrats grâce auquel on transmet certaines informations à l’attention des magistrats. C’est ainsi que j’ai reçu l’information pour une formation sur la liberté d’expression de l’UNESCO. Je n’avais reçu aucune formation dans ce domaine auparavant. J’ai donc décidé de me former en m’inscrivant et en suivant les cinq semaines de cours. J’avoue que cela a été très bénéfique pour moi comme formation. J’ai compris combien le droit à la liberté d’expression était un droit aussi fondamental que le droit à la vie, le droit à un logement décent ou encore le droit à la santé. Le droit à la liberté d’expression est un droit qui permet la réalisation d’autres droits. J’ai vraiment beaucoup appris à travers cette formation et je remercie tous ceux qui nous ont encadrés.
Gaëlle Beng, avocate : Je m’appelle Gaëlle Beng, je suis avocate au barreau de Yaoundé. C’est la société des avocats du Cameroun qui nous a communiqué les informations sur cette formation, et cela m’a paru intéressant dans la mesure où le cadre de la liberté d’expression au Cameroun est bouleversé en ce moment. La plupart des journalistes font face à des abus, donc j’ai pensé que cette formation pourrait m’aider à mieux maîtriser ce type de contentieux, si jamais une telle affaire m’était confiée. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi d’y participer.
Selon vous, quel rôle jouent la liberté d’expression et la liberté de presse dans une société, et en particulier dans le contexte africain?
Béatrice Yameogo Sanon: La liberté d’expression et la liberté de presse jouent un rôle très important dans une société moderne car elles permettent aux citoyens de s’exprimer dans tous les domaines et aussi de s’informer; à travers ces deux libertés d’autres droits peuvent trouver application. Je prends l’exemple de la santé. Les campagnes de sensibilisation dans les journaux, à la radio, à la télévision, sur le net permettent de toucher le maximum de personnes et par la même occasion de réaliser le droit à la santé des citoyens.
Toutefois, de la même manière que la liberté de presse et la liberté d’expression peuvent avoir une influence positive sur les citoyens, elles peuvent aussi avoir un effet dévastateur sur une population. J’ai regardé sur Internet le film sur le génocide rwandais et il en ressort que la presse a joué un rôle, et pas des moindres, dans ce génocide à travers les messages de haine diffusés à la radio, et ce jusque dans les campagnes.
Gaëlle Beng: La liberté d’expression est un droit fondamental qui est consacré par de nombreux instruments juridiques comme la Déclaration universelle des droits de l’homme, et au niveau régional, sous régional, et même national, car il y a des lois au Cameroun qui consacrent la liberté d’expression. Cela est important dans les sociétés africaines car, depuis l’accession des pays africains à l’indépendance, nous avons eu à signer de nombreuses conventions internationales, et dans cette mesure il s’agit de respecter la parole donnée : quand un pays, occidental ou africain, décide de signer et de ratifier une convention dans un instrument juridique interne, il se doit de respecter les conventions en question. C’est un droit qui permet aux journalistes de faire leur travail avec plus de sérénité, car le droit d’accès à l’information est un droit capital, car qui détient l’information détient le pouvoir. Il est donc important que les individus et la société en général soient informés sur ce qui se passe aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur d’un pays, car c’est ça qui permet à un pays de fonctionner.
Quel futur voyez-vous pour la liberté d’expression et la sécurité des journalistes en Afrique? Comment pensez-vous que cela puisse soutenir le développement durable ?
Béatrice Yameogo Sanon : Le droit à la liberté d’expression a beaucoup évolué dans le monde et aussi en Afrique. Le droit à la liberté d’expression est un droit relativement nouveau si je me réfère aux différents textes juridiques et aux cas cités dans les cours.
Beaucoup d’efforts ont été fournis par les Etats africains pour respecter et faire respecter ce droit. Il y a toujours des violations graves au droit à la liberté d’expression et de la presse dans certains pays d’Afrique et aussi dans d’autres continents également. Comme d’autres droits, le droit à la liberté d’expression connaitra un jour une application effective. Il reste encore un long chemin à parcourir en termes de sensibilisation et de volonté des Etats.
Gaëlle Beng : Je préfère être positive, et je pense qu’il y a autant de heurts ces derniers temps en Afrique, c’est parce que les Africains sont en train de prendre conscience de l’existence d’une législation internationale, et que la plupart de nos Etats africains sont des Etats qui se doivent de respecter la loi et les conventions nationales ratifiées. Il y a donc un réveil des consciences à l’égard des droits fondamentaux qui ne peuvent pas être retirés et qui ne devraient pas être limité. Et évidemment, je pense qu’il n’y aura pas de respect unanime des Etats pour ces droits fondamentaux sans lutte. La liberté d’expression doit donc être accordée à tous les échelons de la société.
De quelle manière cette formation pourra aider votre travail en tant que professionnel du judiciaire en Afrique ?
Béatrice Yameogo Sanon : Cette formation m’a amenée à comprendre l’importance de la liberté d’expression et de la liberté de presse dans l’ordonnancement des droits de l’homme. En tant que magistrate, cette formation va mieux m’éclairer dans la prise de décisions dans certains dossiers comme les dossiers de diffamation. J’ai désormais un autre regard dans l’application du droit à la liberté d’expression.
Mme Gaëlle Beng : Le cours m’a apporté une structure vraiment détaillée de la liberté d’expression, le cadre et les instruments juridiques de cette liberté, et m’a également fourni une pléthore de supports, qui vont me permettre, lorsque j’aurai à traiter ce genre d’affaire, de pouvoir défendre mon client, en connaissant une jurisprudence tant nationale qu’internationale. Je me suis rendu compte que d’autres personnes dans ce forum du cours partagent ces points de vue. Je pense donc que je serai mieux équipée maintenant si j’étais par exemple appelée à défendre un journaliste arrêté au Cameroun simplement parce que celui-ci aurait exercé son droit à la liberté d’expression. Je remercie donc les organisateurs de cette formation.
s’inscrit dans la continuité du , en vertu duquel les deux organisations renouvellent leur engagement à renforcer les capacités du personnel judiciaire à travers le continent africain sur les questions de liberté d’expression.
Ce cours en ligne est mis en œuvre par l’Ecole Supérieure de Journalisme de Lille, Reporters sans frontières (RSF) et le Centre d’Étude et de Recherche sur le Droit International et les Droits de l’Homme (CERDIH) du Burkina Faso. Il s’inscrit dans le cadre du , approuvé par le Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies en 2012 et reconnu par
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Ce projet a reçu en particulier le soutien de la Suisse et la Norvège à travers le .