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Gardiennes de la mémoire : les archives sur les génocides sont indispensables à la mémoire, à la recherche et à l’éducation

Lorsque Norng Chann Phal a enfin confronté son accusé devant les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens, l’ombre d’une incertitude subsistait. Il était âgé de 9 ans, et son frère de seulement 6 ans, lorsqu’ils avaient été internés dans la tristement célèbre prison S-21 des Khmers Rouges, et des décennies plus tard, lors du procès, l’accusé ne l’a pas reconnu. Ce n’est que grâce aux , situé à l’emplacement de l’ancien centre d’interrogatoire et de détention, que la véracité des crimes atroces qui y ont été perpétrés a pu être établie.

Le régime a assassiné les deux parents de M. Norng Chann Phal au camp d’exécution de Choeung Ek situé à proximité, sous les chefs d’accusation insensés d’espionnage ou de trahison. « Les archives sont l’outil essentiel pour se souvenir des victimes qui ont perdu la vie sous ce régime Â» a déclaré Hang Nisay, directeur du musée du génocide Tuol Sleng. « Elles permettent de rendre justice aux victimes, non seulement en traduisant un agresseur en justice, mais aussi mentalement en leur permettant de guérir leurs traumatismes et en les faisant reconnaître par la communauté qui les entoure et par la jeune génération. Â»

Réfléchissant au rôle des archives et pour marquer la mémoire des 100 jours du génocide contre les Tutsis au Rwanda en 1994, l’UNESCO et le Département de la communication globale des Nations Unies ont organisé le 22 juin 2021 une table ronde virtuelle sur « La mémoire en danger : l’importance des archives pour la justice, la commémoration, la recherche et l’éducation sur les génocides ». Animée par James Smith, PDG et cofondateur d’ la discussion a réuni des directeurs d’archives, des chercheurs et des défenseurs des droits de l’homme qui travaillent sur le patrimoine documentaire lié au régime nazi allemand, au régime des Khmers Rouges au Cambodge, au génocide de 1994 contre les Tutsis au Rwanda et aux crimes commis par l’El (Daech) contre le peuple yézidi à Sinjar, en Iraq.

Les preuves de ces crimes horribles témoignent de la vie de chaque victime, de chaque famille et de chaque communauté, dont la mémoire ne doit pas être effacée de l’histoire. « Les premiers bénéficiaires des archives sont toujours les familles des victimes Â» a déclaré Floriane Azoulay, directrice des s. Les archives documentaires ont joué un rôle véritablement important dans la recherche des personnes disparues et les demandes d’indemnisation. Maintenant, nous aidons les familles à réparer les « trous Â» de leur histoire familiale. Nous recevons encore 23 000 demandes de renseignements par an. Â» La préservation, la protection et la transmission de ces archives constituent également la base de la recherche et de l’enseignement sur les génocides et les autres crimes d’atrocités, afin d’équiper les gens des connaissances, des compétences, des valeurs et des attitudes susceptibles d’aider à prévenir la violence à l’avenir.

Mis à part le fait qu’ils honorent les victimes et les survivants, les récits historiques véridiques sont essentiels aux processus de transformation des conflits, à une meilleure compréhension des histoires complexes liées au génocide, ainsi qu’à la recherche de la justice. « La documentation et la collecte de preuves et de témoignages de survivants assurent que ces crimes ne sont pas oubliés et qu’il y a une reconnaissance du génocide Â» a déclaré Abid Shamdeen, directeur exécutif de qui milite pour les survivants yézidis aux côtés de Nadia Murad, Prix Nobel de la Paix et ambassadrice de bonne volonté pour la dignité des survivants de la traite des êtres humains, pour l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime. « Dans le cas des Yézidis, il y a eu des preuves publiques en temps réel, puisque l’EI (Daech) utilisait la technologie pour communiquer sur ses actes. Â»

Les archives ont été au cœur de la mémoire au Rwanda et elles ont donné lieu à des recherches récentes sur l’implication du gouvernement français. Sur la base de documents d’archives en France et au Rwanda, deux rapports de recherche indépendants ont contribué à une plus grande transparence sur les processus qui ont conduit et participé au génocide de 1994, y compris au débat public controversé sur l’implication du gouvernement français. Vincent Duclert, chef de la commission historique française sur la France, le Rwanda et le génocide des Tutsis, a indiqué que le rôle essentiel de la commission avait été de contribuer à la clarté historique sur fond de débats politiques pesants.

Plus de 60 000 pages de documents et 8 000 enregistrements audiovisuels, y compris de survivants et d’auteurs du génocide de 1994, ont été recueillis dans le cadre des tribunaux communautaires gacaca. Comme l’a souligné lors de la table ronde Jean Damascène Bizimana, Secrétaire exécutif de la au Rwanda, les documents historiques continuent d’être utilisés dans les procédures judiciaires visant à obtenir justice pour les victimes.

L’exactitude et la transmission des récits historiques prennent d’autant plus d’importance avec la prolifération à travers le monde de la désinformation, des « infox Â» et des théories du complot. En tant que dépositaires d’informations historiques authentiques, les archives représentent un contrepoids indispensable aux récits qui cherchent à déformer ou à nier le passé génocidaire et les expériences des victimes et des survivants.

La table ronde a été organisée conjointement par l’UNESCO et par les programmes de communication sur et sur le mandatés par le Département de la communication mondiale des Nations Unies, dans le cadre de la série en ligne des Nations Unies L’UNESCO soutient les États membres pour la préservation et la protection de leur patrimoine documentaire par le biais du et l’Organisation Å“uvre en faveur de avec son programme sur l’É»å³Ü³¦²¹³Ù¾±´Ç²Ô à la citoyenneté mondiale.

Photo: Arolsen Archives