"Il est essentiel que le patrimoine mondial profite réellement à l’Afrique et à ses communautés", a déclaré Alyssa Barry, une jeune architecte et urbaniste sénégalaise, spécialiste du patrimoine mondial formée par l’UNESCO.
Elle fait partie des nombreux experts réunis à la Conférence internationale de l’UNESCO sur le patrimoine culturel en Afrique, organisée du 6 au 9 mai 2025 à Nairobi, au Kenya. Cet événement, qui a réuni 54 pays et des spécialistes du monde entier, visait à redéfinir la manière dont le patrimoine est compris et géré sur l’ensemble du continent.
Les communautés au cœur de la préservation et de la valorisation du patrimoine
Cette conférence intervient à un moment crucial : depuis 2018, la Directrice Générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, s’est engagée à renforcer la représentation des sites africains sur la . Grâce à cette initiative, le nombre de sites inscrits en Afrique subsaharienne est passé de 93 à 108 ces dernières années.
Cependant, 11 pays africains ne figurent toujours pas sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Le continent compte également un nombre important de à l’échelle mondiale. Afin de préserver et valoriser ce patrimoine, la conférence a mis en avant plusieurs pistes d’action, notamment l’importance des initiatives africaines, fondées sur l’implication active des communautés locales.
Les industries culturelles et créatives ouvrent des perspectives professionnelles particulièrement prometteuses pour la jeunesse africaine. Afin de renforcer leurs compétences, l’UNESCO a lancé en 2021 un , en partenariat avec le Fond pour le patrimoine mondial africain, l’ICCROM, l’ICOMOS et l’IUCN. À ce jour, 60 experts, 30 hommes et 30 femmes issus 46 pays différents, dont les 11 pays africains encore non représentés, ont déjà bénéficié de ce programme.
Parmi eux figure Samson Faboye, originaire du Nigeria. "Le programme de mentorat de l’UNESCO pour les professionnels africains du patrimoine m’a permis de mieux comprendre les subtilités du processus de candidature à l’inscription au patrimoine mondial", explique-t-il.
Au-delà des nouvelles inscriptions, les programmes de l’UNESCO contribuent également à renforcer la visibilité et la protection des sites africains. "La gestion du patrimoine ne consiste pas simplement à en assurer la conservation. Il faut aussi en parler, le partager et sensibiliser les publics à son importance", a déclaré Fatma Twahir, gestionnaire du site de Fort Jesus à Mombasa, un bien inscrit sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO au Kenya.
Ces efforts commencent à porter leurs fruits. En juillet 2025, deux candidatures issues de pays jusqu’ici non représentés seront soumises au Comité du patrimoine mondial : la Réserve de biosphère de l’archipel des Bijagos en Guinée-Bissau, et le complexe Gola Tiwai en Sierra Leone. Sept autres pays devraient présenter leur toute première candidature d’ici 2027.
Plusieurs sites ont également été retirés de la Liste du patrimoine mondial en péril, notamment les Tombes des rois du Buganda à Kasubi en Ouganda et le parc national du Niokolo-Koba au Sénégal, grâce à la collaboration entre les autorités nationales, les experts locaux et l’UNESCO.
Le Document de Nairobi sur l’authenticité du patrimoine
Afin d’accompagner cette dynamique d’inscriptions africaines au patrimoine mondial, les participants à la conférence ont adopté le Document de Nairobi sur l’authenticité du patrimoine. Véritable feuille de route, ce texte propose des orientations pour améliorer la préservation des sites déjà inscrits et renforcer la participation des communautés locales et autochtones.
Pour Audrey Azoulay, cela représente l’aboutissement d’un long cheminement : "Tout a commencé en Afrique, à Abou Simbel, lorsque le monde entier s’est réuni pour sauver les temples nubiens, donnant naissance à la Convention du patrimoine mondial. Aujourd’hui, cette conférence internationale à Nairobi reflète et renforce tous nos efforts pour accompagner les États membres africains et reconnaître, ainsi que protéger, le patrimoine africain."
Il s’agit de mettre en valeur la richesse, la vitalité et la complexité des sites naturels et culturels du continent. William Ruto, Président de la République du Kenya, a rappelé que "comme cela l’a été souligné lors de la Conférence de Nairobi 2025, le patrimoine africain est pluriel, dynamique et ancré dans les communautés." Selon lui, "Le Document final témoigne de la profondeur des perspectives africaines et ouvre la voie à une compréhension internationale enrichie de l’authenticité en matière de patrimoine. Je suis honoré de recevoir officiellement le Document final de Nairobi sur l’authenticité du patrimoine. Qu’il nous guide vers un avenir du patrimoine plus juste, inclusif et représentatif."